Raton-Liseur - Lectures de 2011

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Raton-Liseur - Lectures de 2011

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1raton-liseur
feb 2, 2011, 2:00 pm

J’entame enfin aujourd’hui ma liste de lecture pour l’année 2011, renouvelant ainsi l’expérience de l’année précédente (cf. Lectures de 2010).
Aucun défi, aucune consigne de lecture, j’aime trop vagabonder d’étagères en étagères au gré de je ne sais quelle fantaisie du moment. Ce sera donc une liste de lecture sans queue ni tête que vous pourrez suivre ici. Et j’espère faire de jolies découvertes et avoir la plume (le clavier ?) assez alerte pour vous les faire partager !

Tout comme certains d’entre vous (que je remercie ici !) sont venus me visiter en 2010 et ont laissé quelques commentaires, ou questions, n’hésitez pas à laisser un message !

Bon vagabondage livresque à tous !

2raton-liseur
feb 2, 2011, 2:10 pm

1. Ces Messieurs de Saint Malo - Bernard Simiot
Un roman historique qui n’est pas dénué d’intérêt. Situé à Saint-Malo au tournant du XVIIIème siècle, il retrace la montée de la bourgeoisie urbaine, grâce à l’essor de la course (cet euphémisme qui désigne les raids corsaires sur les navires marchands des nombreux pays alors en guerre contre la France de Louis XIV) et au début du commerce avec les pays d’Asie et d’ailleurs.
Bernard Simiot n’est pas un conteur fantastique ; l’histoire est plutôt plate, et les personnages sans grande consistance. Ce livre ne vaut donc pour moi que par son aspect historique (même si je suis loin d’être qualifiée pour apprécier la justesse du propos). C’est avant tout le début du capitalisme, au fort goût d’aventure, où investissement et prise de risque vont de paire. C’est aussi et surtout l’histoire de la création d’une bourgeoisie au sens premier du terme, c’est-à-dire une élite de ville. Une élite d’abord économique, mais qui aspire à la reconnaissance (d’où les achats de lettres de noblesse), et qui très vite aspirera à plus, c’est-à-dire au pouvoir politique. C’est comme si ce roman montrait à l’œuvre les ferments qui donneront la Révolution française, pas celle des Droits de l’Homme, cela c’est notre historiographie nationale, mais la révolution bourgeoise qui a triomphé et a marqué les institutions de notre XIXème siècle et de notre modernité.
A lire si la période ou le sujet vous intéresse, sinon, il est des livres historiques mieux écrits. Pour en citer un sur un sujet assez similaire, la naissance du capitalisme et de la spéculation financière, cette fois à Amsterdam dans les années 1650-1660, The coffee trader de David Liss est un régal, avec une histoire bien menée et une très intéressante description historique.

3raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 5:47 am

2. Contes pour un homme seul - Yves Thériault
Quand pour la première fois le Troublé en parla, on se gaussa de lui dans le hameau. Tant l’idée semblait étrange, et pas du tout de celles qui sont les vraies idées, propres à croire.
Mais on se dit que c’était le Troublé, et que l’idée ne valait que ça.
Puis les nuits vinrent qui étaient les nuits de pêche, les nuits longues et bleues, avec toutes les étoiles et le chant doux qui monte du fond de la mer, alors on oublia bien que le Troublé avait ouï le son d’une fleur.
Mais lui ne l’oublia pas.
(Première partie, Chapitre I, “La fleur qui faisait un son”, p. 17).
Yves Thériault semble être un auteur connu et reconnu au Québec. Il m’était tout à fait inconnu jusqu’à ce que je m’aventure à la Librairie du Québec, à Paris (répertoriée ici sur BiblioChose), pour acheter un livre repéré il y a quelques mois ici même et publié au Canada mais pas encore en France. (Le livre en question est Du bon usage des étoiles, de Dominique Fortier. Merci à Cecilturtle pour cette découverte, dans laquelle je compte me plonger d’ici peu…).
Je découvre donc Yves Thériault grâce à ce recueil de nouvelles, à moins que ce ne soit un roman. Chaque chapitre est une courte histoire qui se suffit à elle-même, même si les histoires se répondent l’une l’autre et si toutes les nouvelles ont pour cadre un même village, sur la côte de l’Atlantique Nord.
Il émane souvent une certaine tristesse de ces nouvelles, et rares sont celles qui finissent sur une note joyeuse. Une forme de poésie est sensible aussi, même s’il me semble que le format est trop court pour que l’auteur déploie véritablement ses images et sa prose.
Peut-être pas le meilleur livre pour aborder cet auteur, mais un écrivain à surveiller, certainement pour un roman la prochaine fois.

4raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 5:48 am

3. L’Oiseau Canadèche - Jim Dodge
Tu sais, j’ai assisté à trente mille couchers de soleil. Il n’y en a pas deux qui se ressemblent. Que pouvons-nous demander de plus ? (Chapitre IV, “Le deuxième cœur”, p. 83).
Un livre qui promet des grands espaces, une histoire simple mais pleine de sens. Il y a beaucoup de livres de ce style dans la littérature américaine, notamment dans la branche du « nature writing », mais ils sont de qualité très inégale.
Et celui-ci ne fait hélas pas partie des meilleurs. Certes, il est question d’une vie simple, gagnée au poker, arrosée au whisky et peuplée de silences savourés. Une vie simple, certains diraient monotone, je dirais plutôt harmonieuse, une vie qui se suffit à elle-même et n’a rien à envier aux autres vies.
Mes les descriptions de Jim Dodge ne m’ont pas parues inoubliables, ni particulièrement bien ciselées ou originales ; ni les paysages ni les personnages ne m’ont touchée. En un mot, j’ai trouvé ce livre plat et je suis contente qu’il fasse si peu de pages.

5raton-liseur
feb 7, 2011, 8:52 am

4. L’épopée des Normands de Sicile - Tome 7/7 - A l’Orient du Monde - Viviane Moore
Le dernier tome de la saga de Tancrède le Normand, et il était temps qu’elle arrive à sa conclusion. Autant les premiers tomes m’ont fait découvrir des aspects des XIIème et XIIIème siècles que je ne connaissais pas, lorsque les Normands étendaient leur puissance le long de toutes les côtes européennes, autant les derniers tomes, plus axés sur le monde byzantin et les croisades semblent s’essouffler et avoir fait l’objet de moins de recherche historique.

6Cecilturtle
feb 7, 2011, 9:05 pm

Je recommande Agaguk pour véritablement découvrir Yves Thériault. C'est une histoire très crue, parfois brutale, mais on y respire et vit le Grand Nord. Malheureusement, c'était une lecture obligatoire au lycée - totalement inadaptée (à mon avis) pour des ados, mais je suis sûre qu'à relire ce livre aujourd'hui je l'apprécierai à sa juste valeur...

7raton-liseur
feb 9, 2011, 5:14 am

Denne meddelelse er blevet slettet af dens forfatter.

8raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 5:49 am

5. Trudi la naine - Ursula Hegi
il fallait bien du courage aux rares personnes soucieuses de préserver le tissu de la vérité pour empêcher ses fibres de moisir sous la chape du silence et de la complicité que les gens, souvent avec les meilleures intentions du monde, posaient pour se protéger les uns des autres. (Chapitre 1, “1915-1918”, p. 36).
Même si Trudi n’aime pas entendre ce mot dans la bouche des autres, c’est souvent la seule chose qu’ils voient d’elle : c’est une naine et du fait de sa petite taille, tout un chacun croit que ses rêves et ses désirs sont eux aussi plus petits, plus étroits.
C’est par les yeux de Trudi que nous assistons aux évènements de la première moitié du XXème siècle (de 1915 à 1952 exactement) dans un petit village fictif sur les bords du Rhin, Burgdorf dans les environs de Düsseldorf. Trente ou quarante années cruciales, et plutôt noires, de l’histoire allemande. Des années sur lesquelles nous n’avons pas fini de nous interroger, qui n’ont pas fini de nous interroger. Comment est-il possible d’en arriver là ? Qu’aurais-je fais dans une situation similaire ?...
Aucun livre, de fiction ou d’histoire, ne répondra de façon définitive à ces questions. Ursula Hegi, dans ce livre de plus de 700 pages, tente d’apporter sa contribution à cette réflexion, par le biais de ce personnage qui porte sa différence en bandoulière, comme un jour les Juifs ont commencé à porter la leur sur le revers de leur manteau.

Au premier abord, Trudi n’est pas un personnage très attachant. Les humiliations quotidiennes qu’elle a subies du fait de son apparence physique ont aigri son caractère et l’ont presque rendue méchante, pensant avant tout à meurtrir et à humilier à son tour. Mais elle a, notamment grâce à son père, le très doux et charismatique Leo Montag, un sens très net de ce qui est juste et elle saura faire les choix nécessaires pour ressortir la tête haute. De façon intéressante, elle semble d’ailleurs plus encline à aider de parfaits inconnus plutôt que les gens de son village (à quelques exceptions près), comme s’il était plus facile d’aider un inconnu (qui incarne une figure humaine) qu’une personne que l’on connaît et donc on connaît donc les turpitudes ou les bassesses.
Mais Trudi s’adoucira, en sens inverse de son pays qui devient de plus en plus inhumain, qui, de plus en plus rejette la différence. Pas d’action d’éclat dans ce livre, pas de grand réseau de résistance faisant preuve d’un courage hors du commun, pas non plus de monstre sanguinaire, juste des gens qui font en silence ce qu’ils considèrent comme leur devoir, d’autres qui se coulent dans le moule et savent en profiter, et beaucoup qui demeurent silencieux et font le dos rond. Probablement une bonne représentation de ceux qu’ont été les Allemands pendant cette période.

La thèse d’Ursula Hegi est que cette situation a pu se développer grâce à la culture du qu’en-dira-t-on et des arrangements avec la vérité qui prévalait dans l’Allemagne du début du siècle. Une culture qui ne laissait pas non plus place au questionnement ou au doute. Comme il sera assené à Trudi plusieurs fois au cours de son éducation (catholique), questionner, c’est déjà ne pas avoir la foi, c’est donc pécher. Pour développer cet argument, Ursula Hegi consacre les quelques 150 ou 200 premières pages de son livre à faire évoluer ses personnages dans l’atmosphère étouffante de la petite bourgade de Burgdorf dans les années qui suivent la fin de la première guerre mondiale. Cela rend le roman lent dans ce premier tiers, mais les arguments développés sans en avoir l’air prennent leur sens dans la suite du livre, et j’ai alors pardonné ce qui m’était apparu au premier abord comme des longueurs. La fin est peut-être aussi un peu trop sirupeuse et pleine d’une introspection de façade sur ce que le fait de se souvenir (de façon sélective) et de raconter (selon un autre processus de sélection) révèle d’une personne ou d’une société.
Mais, entre un début un peu lent et une fin pas tout à fait dans la ligne du reste du roman, il y a des pages véritablement prenantes. L’écriture est simple et directe, et elle aborde de front des questions récurrentes mais aussi des questions plus subtiles sur le comportement des civils allemands pendant la montée du nazisme et la guerre.
La question du silence bien sûr, et à partir de quand le silence devient-il complicité, puis même responsabilité ? Mais il y a aussi des réflexions plus dérangeantes, faites par certains personnages, des aspects de la question auxquels je n’avais personnellement jamais pensés, et c’est cela que j’ai aimé dans ce livre, cette capacité à éclairer les dilemmes moraux d’un éclairage cru et nouveau. Comme penser à ces Allemands qui ont souhaité la défaite de leur pays, qui savait que l’Allemagne se relèverait mieux d’une défaite que d’une victoire. Peut-être cela paraît-il évident à certains d’entre vous, mais je n’avais jamais envisagé que la guerre ait été pensée dans ces termes.
Le livre, à plusieurs reprises, revient sur la barrière entre persécutés et persécuteurs, avec notamment un regard plein d’un mélange de rejet et de compassion pour les persécuteurs. Sans les absoudre ni même réellement chercher les causes de leur engagement, Ursula Hegi, d’une certaine façon, les plaint, plaint leur manque d’humanité. Comme un des personnages, Mme Blau qui se fait cette réflexion : « oui, si elle avait le choix, elle préférait être une persécutée plutôt que d’être une persécutrice. Dans les deux cas, le prix à payer était terrible ; mais elle préférait encore subir l’humiliation et la peur plutôt que de devenir totalement insensible à ce qui faisait l’humain. » (Chapitre 11, “1938”, p. 369).
Mais à un autre moment, constater que de toute façon le persécuté perd toujours. On lui prend d’abord ce qu’il pense avoir gagné à la sueur de son front, avoir mérité : ses richesses, ses meubles, ses souvenirs. Puis quand il n’a plus rien de personnel, on s’attache à le dépouiller de ce que l’on croyait acquis pour tous : sa famille, être à l’abri du froid et de la faim. Alors soit il meurt, soit il s’accroche et tente de survivre, donnant alors raison à ses bourreaux pour qui il est moins qu’un homme, tout juste un animal.

Des pensées dures, des moments sombres, ce livre est une contribution à un certain devoir de mémoire, celui qui cherche à décortiquer les évènements et à ne pas les édulcorer, pointant du doigt ce que nos petits accommodements peuvent avoir de monstrueux et nous obligeant à réfléchir à notre responsabilité dans les grands évènements, aux extrêmes auxquels peuvent conduire nos petites lâchetés et notre refus de regarder.

9raton-liseur
Redigeret: jan 10, 2012, 12:17 pm

Petite publicité gratuite qui n’engage que moi : J’ai découvert le livre ci-dessous au détour d’une émission littéraire que j’aime écouter régulièrement : Littérature sans frontières, programmée je crois le samedi après-midi (heure française) sur RFI (Radio France International) et aussi disponible en "podcast".
La première fois que j’achète un livre suite à une de ces émissions, et c’est plutôt réussi ! Une expérience à renouveler peut-être donc ?

6. Sukkwan Island - David Vann
Ses sanglots repartirent de plus belle, mi-pleurs, mi-cris. Ils pouvaient se déclencher n’importe quand, ils avaient une volonté propre, et si pleurer était censé soulager, ce n’était pas le cas pour lui. C’étaient des sanglots terribles, de ceux qui blessent et qui transforment tout en une épreuve de plus en plus insupportable, et s’ils lui faisaient passer le temps, ils semblaient à chaque fois ne plus vouloir s’arrêter. (Deuxième partie, p. 121).
Sukkwan Island est dédié à James Edwin Vann, 1940-1980, le père de l’auteur, qui s’est suicidé lorsque ce dernier avait 13 ans. Similarités de noms, d’âges, de lieux aussi avec les personnages de ce roman, similarités non fortuites. Comme l’explique lui-même David Vann dans les entretiens qu’il donne pour accompagner la sortie de ce roman, il a pendant de nombreuses années cherché à écrire un livre qui lui permette de comprendre le geste de son père. Après avoir essayé le style de l’enquête ou de la biographie, c’est l’écriture de ce roman, où, paradoxalement peut-être, si le père peut être considéré comme suicidaire, il ne se donnera pas la mort, qui a permis à David Vann de trouver la voix nécessaire pour tenter de mieux comprendre son père. Même si ce roman, de l’aveu même de l’auteur, ne lui aura pas permis de faire le tour de la question, qui continue à le hanter.

Il est très difficile de parler de ce livre sans en dévoiler les faits importants. Même l’entretien que j’ai écouté ou la quatrième de couverture en disent trop à mon sens. Je vais pourtant essayer. Car ce roman est, désolée pour l’expression éculée, “un coup de poing”. Un livre à la limite du supportable, je crois que j’avais presque envie de vomir en le reposant après en avoir lu la dernière page avant-hier soir, et il m’a tenue éveillée un bon moment.
Le livre se passe sur une île déserte du sud de l’Alaska, qu’un homme, Jim, achète afin d’y passer une année solitaire avec son fils de 13 ans, Roy. Une année solitaire à vivre comme des pionniers, une année pour se connaître et renouer une relation père-fils plus forte. Mais on comprend vite que ce rêve est aussi une fuite en avant, celle d’un homme qui rate tout ce qu’il entreprend, qui ne sait pas comment faire face aux petits obstacles quotidiens qui se présentent sur sa route, des petites bosses pas même des obstacles. Une aventure si mal préparée et entreprise pour de si mauvaises raisons ne peut que tourner à la catastrophe, et c’est bien ce qui arrivera.

La force du livre réside, entre autres, dans la confrontation entre d’un côté les paysages que l’on imagine grandioses du Grand Nord, la pureté et la vérité simple qu’on leur attribue de clichés en clichés et de l’autre la plongée jusqu’à la nausée dans la pensée des personnages, principalement de Jim, le père, dans ses doutes, ses raisonnements fallacieux, sa lâcheté incommensurable et ses abîmes de désespoir et d’indécision.
David Vann nous fait réfléchir sur la relation entre être suicidaire et se suicider (entre l’état d’esprit et le passage à l’acte). Il nous fait réfléchir sur la difficulté de vivre que peuvent ressentir certains êtres, une profonde et peut-être irréversible peur face à tout ce qui fait la vie, ou la vie en société. Y a-t-il quelque chose que l’on peut faire pour aider ces hommes sans direction ni gouvernail, pour combattre ces peurs infinies. David Vann aurait-il pu sauver son père ? Il portera probablement longtemps la culpabilité de ne pas avoir pu éviter sa mort et pourtant ce livre me laisse penser que tous les hommes ne peuvent pas être sauvés, qu’on ne peut pas secourir quelqu’un contre sa volonté, ou, il serait peut-être plus exact de dire contre son absence de volonté. Et c’est là le drame de ceux qu’on laisse derrière, qui ont la force de vivre, mais pas la force de vivre pour deux.
Un grand coup de chapeau à David Vann pour ce livre, pour la persévérance dont il a fait preuve pour trouver le ton de son écriture, puis pour le faire publier. Je ne sais si cela lui était nécessaire pour mieux apprivoiser son propre passé, en tout cas c’est un livre qui m’a fait réfléchir sur un sujet difficile, souvent tabou. Avec un ton cru, une écriture factuelle, loin du romantisme noir ou de la condamnation de principe. Un livre que je recommande chaudement, pour un jour où vous avez les tripes et l’optimisme bien accrochés.

10raton-liseur
Redigeret: sep 26, 2011, 6:21 pm

7. Un long chemin - Herbjørg Wassmo
Elle contemple sa vie de l’extérieur, pareille à un léger soupir de révolte. A peine une vaguelette sur un océan de guerres, de servitudes et de sang. (Chapitre 5, p. 73).
Il ne sert à rien de pleurer sur sa propre situation. Tout aurait pu être pire – s’il n’avait pas existé des failles dans l’horreur de la guerre. (Chapitre 9, p. 150).
Un chemin bien long, qui n’est pas seulement celui de deux jours d’hiver à fuir la Finlande occupée pour rejoindre la Suède. C’est aussi le chemin jamais fini pour accepter et vivre avec les conséquences de ses choix. Ce livre, dont les 3 personnages principaux étaient encore en vie au moment où il a été publié en 1984, raconte la fuite d’une famille menacée par les activités de résistance du père. Cette fuite en plein mois de janvier 1945 les laissera tous marqués à vie, physiquement, après l’amputation des membres nécrosés, pieds, mains, nez…
C’est l’histoire difficile d’un enfant de 6 ans qui doit réapprendre à marcher, d’une mère qui doit renoncer à jouer du piano, et d’un père qui a failli causer la mort de ceux qu’il aime le plus. Mais le choix était entre mourir et tenter de survivre.
Le livre donne principalement la parole à l’enfant et à la mère. Ce sont d’ailleurs deux pensées de la mère que j’ai mises en exergue de cette critique, deux pensées qui reflètent la démesure entre les évènements auxquels elle est confrontée et sa vie.

Je ne suis pas sûre d’avoir vu dans ce livre l’intention première de l’auteur à savoir, comme elle l’explique dans sa préface, rendre hommage à ceux qui ne recevront jamais de médaille, notamment les femmes et les enfants qui eux aussi ont payé un prix fort dans cette guerre. Car je n’y ai pas vu la passivité de ces personnes emportées malgré elles dans le tourbillon de la guerre que semble sous-entendre Herbjørg Wassmo. Au contraire, j’y ai vu des personnes qui, quelque soit leur sexe ou leur âge sont à tout instant acteurs de leur propre vie. Mais j’y ai trouvé de beaux passages sur le courage ordinaire, de ces trois personnes dont nous ne connaîtrons pas l’identité et c’est mieux ainsi, mais aussi de tous ceux qui les ont aidé sur leur chemin. C’est aussi un livre sur le courage de faire avec les circonstances de la vie envers et contre tout, peut-être parce que c’est là que réside l’humanité.

11raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 5:51 am

8. Où j’ai laissé mon âme - Jérôme Ferrari
Il a le pouvoir (…) de décider qui doit rester nu et combien de temps, il peut ordonner que le jour et la nuit ne franchissent pas les portes des cellules, il est le maître de l’eau et du feu, le maître des supplices, il dirige une machine, énorme et compliquée, pleine de tuyaux, de fils électriques, de bourdonnements et de chair, presque vivante, il lui fournit inlassablement le carburant organique que réclame son insatiable voracité, il la fait fonctionner mais c’est elle qui régit son existence et, contre elle, il ne peut rien. Il a toujours méprisé le pouvoir, l’incommensurable impuissance que son exercice dissimule, et jamais il ne s’est senti aussi impuissant. (Partie II, “28 mars 1957 : deuxième jour”, p. 93-94).
Un livre dur, certes. Qui explore l’état d’esprit qui a pu animer les tortionnaires de la Guerre d’Algérie. Romançant un épisode réel de ce qui est longtemps resté des « évènements » (le livre est très vraisemblablement inspiré, malgré les changements de noms et de dates, de l’arrestation, le 23 février 1957, de Larbi Ben M’hidi, membre du FLN et organisateur des premiers attentats à Alger. Il fut exécuté dans la nuit du 3 au 4 mars 1957, par pendaison maquillée en suicide. Le général Bigeard lui avait rendu un hommage militaire avant de le confier aux Services Spéciaux du général Aussaresses qui l’exécutèrent.), il oppose deux hommes qui, malgré des parcours similaires (notamment la participation à la débâcle militaire de Diên Biên Phu en Indochine à peine trois ans plus tôt et l’internement dans un camp de « rééducation » Viêt Minh), réagissent de façon diamétralement opposée au rôle qui leur est confié pendant la Guerre d’Algérie, une guerre du renseignement, le renseignement à tout prix.
Si l’un s’accommode de son rôle de tortionnaire, y voyant une une façon de prouver sa loyauté et, me semble-t-il, y laissant s’exprimer ses instincts les plus noirs et, en temps ordinaire, inavouables, l’autre ne supporte pas ce qu’il considère comme une trahison de ce qui a motivé son engagement militaire.

Ce livre est écrit, et c’est voulu je pense, dans un style plat et psalmodiant. « Chirurgical » disent certaines critiques. Si la volonté est pour l’auteur de rester a distance, cela m’a aussi laissée moi lectrice à distance, glissant sur ce plat sans jamais accrocher.
Et, si je respecte l’abîme moral et la difficulté de vivre avec soi-même lorsque l’on a accompli de telles exactions, je trouve la frontière entre la douleur du bourreau et celle de la victime trop fine, comme mettant les deux sur un pied d’égalité, au point d’en devenir obscène.
D’autres choses me gênent dans ce livre, comme la sensation que la torture morale (menacer quelqu’un de torturer ses enfants, sa femme, par exemple) est plus acceptable, plus facile à supporter pour le bourreau, comme si c’était une torture plus propre que la gégène… Ou encore le côté mystique du livre, où le bourreau torturé par ses états d’âme se compare à Ponce Pilate (avant et après la condamnation de Jésus, pas au moment où il s’en lave les mains, étrangement) et même se compare à Jésus sur le Mont des Oliviers (brouillant encore une fois la frontière entre bourreau et victime). Tout cela me paraît un peu excessif.
Un livre duquel je suis restée au-dehors, même si je comprends l’engouement (mérité) qu’il a suscité lors de sa parution. Il a en quelque sorte au moins le mérite de montrer que l’histoire est écrite par les vainqueurs (le débat, trop timide, qui entoure la Guerre d’Algérie aurait été très différent si elle ne s’était terminée par l’indépendance de ces quatre départements français) et, plus personnellement, il m’aura fait me pencher sur une période de notre histoire récente que, je peine à l’avouer, je connais très mal.

12raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 5:52 am

9. Season of the rainbirds (La saison des coucous*) - Nadeem Aslam
I’m an optimist. Anything’s possible in a country where the land reforms are welcomed by the landowners. (Chapitre 2, “Thursday”, p. 35).**
Un livre qui semble écrit sur commande, pour le marché des “lecteurs conscients des problèmes du monde mais qui ne veulent pas trop se prendre la tête”. Il remplit consciencieusement son cahier des charges, et tombe complètement à plat… Il est question de voile parce que ce sont des musulmans, c’est normal, non ? Il est question de corruption parce qu’on est au Pakistan quand même. Le lecteur est conforté dans ses préjugés, dans sa connaissance parcellaire d’un pays qui fait trop souvent la une des informations, et n’apprend rien.
Là où le livre aurait pu être intéressant, par exemple lorsqu’il mentionne les intouchables, il glisse discrètement sur le sujet, ne bousculons pas les idées reçues : les intouchables, c’est l’hindouisme, ne remettons pas cela en cause…
En plus de tout cela, un style lourd, aussi lourd que le début de la saison des pluies pendant laquelle se passe cette histoire. Enfin, une histoire, c’est beaucoup dire, tout est décousu. Il y a bien un meurtre pour ouvrir le livre, mais c’est à peine un prétexte pour un livre qui n’a pas de fin, juste deux semaines prises au hasard dans la vie d’un petit village des environs de Lahore.
Alors certes il y a une ironie agréable, et une phrase intéressante qui me semble donner une clef importante pour comprendre la prééminence de la tradition dans la vie individuelle : « Nothing is that simple. Since they live among other people they have a responsibility, a moral obligation, towards those people. We must make them see this. They cannot ignore the wishes of the rest of us and still continue to live among us. »*** (Chapitre 8, “Thursday”, p. 164). Il s’agit de la déclaration d’un responsable religieux à propos de deux personnes dans le village vivant maritalement…
Mais cela ne rachète certainement pas les insuffisances de ce livre. Dommage…

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

** Tentative de traduction personnelle : « Je suis optimiste. Tout est possible dans un pays où les réformes agraires sont accueillies favorablement par les propriétaires terriens. »
*** Tentative de traduction personnelle : « Les choses ne sont pas si simples. Puisqu’ils vivent parmi d’autres personnes, ils ont une responsabilité, une obligation morale, envers ces personnes. Nous devons le leur faire comprendre. Ils ne peuvent ignorer nos souhaits à nous et continuer à vivre parmi nous. »

13raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 5:53 am

10. The Reluctant fundamentalist (L’Intégriste malgré lui) - Mohsin Hamid
Many parents were strict, and sometimes weeks would pass without us being able to meet those we thought of as our girlfriends. So we learned to savor the denial of gratification – that most un-American of pleasures! (Chapitre 5, p. 69).
La difficulté de vivre dans une autre culture. Entre fascination et rejet. Un livre qui montre le mirage de l’intégration, quand l’autre culture est à la fois ce à quoi l’on aspire et comme une insulte continuelle jetée à la face de là d’où l’on vient.
Ce livre court (un peu plus de cent pages très aérées) est très bien écrit, on se sent vraiment au centre de la discussion, et pour cause : l’auteur a pris un risque (qu’il maîtrise très bien), celui de s’adresser directement au lecteur, à la deuxième personne, comme dans un dialogue entre un occidental qui semble un peu perdu dans Lahore et un habitant de la ville qui l’aborde et, de fil en aiguille, lui raconte sa vie. Changez, tel est le nom de cet interlocuteur, un nom qui semble incarner à lui seul ce personnage qui apprend à se mouvoir dans un environnement qui n’est pas le sien.
La première partie du livre, qui décrit l’immersion de Changez dans la culture des Etats-Unis et son envie de réussir est très intéressante et me semble sonner juste. Il cherche à se conformer aux attentes de ce nouvel environnement, mais ce n’est pas subi, il a envie de se couler dans ce nouveau moule. Et il réussit, il est fier de cette réussite, de savoir comment utiliser le système, et que le système lui permette de mettre à profit ses qualités.
Mais la cassure ne se fait pas attendre, et ce sont les attentats du 11 septembre qui seront décisifs pour Changez, dont le malaise (déjà présent mais jusqu’alors étouffé par sa réussite éclatante) prend le dessus et qui s’interroge sur son identité et son envie d’embrasser cette nouvelle culture. Ce changement dans la psychologie du personnage manque hélas à mon avis de profondeur, alors que c’est un sujet passionnant qui mériterait plus d’analyse de la part de l’auteur (les chefs des mouvements terroristes actuels ne sont-ils pas pour beaucoup des hommes qui ont passé de nombreuses années dans le giron de l’Occident avant de se retourner contre lui ?).
Malgré tout, un livre bien mené, dont le suspens ne fait que croître et dont j’ai beaucoup aimé la fin, sur laquelle je ne peux hélas pas m’étendre ici…

* Tentative de traduction personnelle : « De nombreux parents étaient stricts et il pouvait parfois s’écouler plusieurs semaines avant que nous puissions rencontrer celles que nous considérions comme nos petites amies. C’est pourquoi nous avons appris à savourer la négation de notre satisfaction – un plaisir bien peu américain ! »

14raton-liseur
Redigeret: sep 26, 2011, 6:19 pm

11. Le cheval couché - Xavier Grall
Si tous les chanteurs bretons se levaient un jour, à la même heure, et s’ils s’accordaient pour célébrer le soleil d’un même chœur, ce serait un vaste chant matutinal et le soleil ne se coucherait plus…(Chapitre V, “Le chant du monde”, p. 176).
Ce livre se veut une réponse au fameux Cheval d’orgueil de Pierre Jakez Hélias, livre jugé passéiste et larmoyant et auteur jugé pas assez revendicatif. Mais finalement, c’est plus son succès qu’il lui reproche, succès qui reposerait sur de mauvaises raisons, comme un enterrement d’une Bretagne passéiste et moribonde.
L’emploi du “nous” et le ton belliqueux sont assez désagréables, mais ce livre est à remettre dans son contexte. Publié en 1977 (soit moins de deux ans après la sortie du Cheval d’orgueil), il reflète l’état d’esprit d’une génération issue des Trente Glorieuses et de Mai 68 qui se cherche une identité culturelle et des racines, au-delà de la culture de masse et du consumérisme. En Bretagne, cette génération a été clef pour le renouveau de l’identité bretonne (mise à mal notamment par les mauvaises alliances pendant la seconde guerre mondiale) et elle a ouvert la voie au dynamisme culturel qui fleurit depuis quelques décennies, où la culture s’invente et ne se complaît pas seulement dans la sauvegarde des traditions (en raccourci, la techno bretonnante de Denez Prigent plutôt que les défilés folkloriques…).
Mais pour en arriver là, il a fallu une génération qui s’est cherchée, qui a hésité entre combat indépendantiste et combat culturel. Ce livre en est le témoignage, avec son ton de confrontation qui tente de masquer une argumentation un peu courte. L’Homme aux semelles de vent de Michel Le Bris est dans la même veine, tout aussi horripilant à lire, plein de la même mauvaise foi dans la présentation des arguments…

En y regardant de plus près, on s’aperçoit que la question de la légitimité (est-ce qu’être Breton c’est être né en Bretagne, y vivre, les deux ?) n’est pas tranchée (même si rares sont ceux qui semblent pouvoir prétendre au label). L’identité semble ramenée à la seule question des artistes, ce qui me paraît bien réducteur (moi je fais mes gâteaux au beurre salé, toujours, même dans mes montagnes népalaises. Est-ce que ça aussi ce n’est pas un petit bout d’identité bretonne, même si je n’écris ni poème ni chanson ?).
En définitive, ce livre est intéressant par le témoignage qu’il représente pour ceux intéressés par la question de l’identité bretonne, mais n’est certainement pas à lire pour ses qualités d’analyse. A noter que Xavier Grall lui-même a reconnu les limites de son ouvrage. J’en retiens quand même à la fin une jolie évocation de Jack Kerouac à la fin de sa vie et du voyage en Bretagne qu’il n’a jamais fait, et surtout une belle description de Glenmor, ce grand chanteur bourru et poétique qui a si bien mis en notes et en rimes les paysages bretons et ceux qui les habitent.

15raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 5:59 am

12. Blade Runner - Philip K. Dick
Quel sale boulot je fais ! se dit [Rick]. Je suis un fléau, comme la peste ou les famines. Fléau de Dieu à la petite semaine. Comme l'a dit Mercer, il faut que je fasse le mal, j'y suis tenu. Depuis le début, je n'ai pas cessé de faire le mal. C'est pas tout ça, mais il est temps que je rentre chez moi. Peut-être qu’après avoir passé quelque temps chez moi, en compagnie de ma femme, j’oublierai tout ça… (Chapitre 20, p. 233).
Les livres de Philip K. Dick m’ont toujours paru d’une qualité très inégale, Substance mort me paraissant un de ses plus aboutis. Dans ce foisonnement hétéroclite, Blade Runner, malgré sa grande renommée, ne me paraît pas être un opus particulièrement réussi. L’idée est intéressante, se demander où commence et où s’arrête l’humanité, ce qui distingue les êtres humains d’autres constructions biologiques. Mais le roman est mal ficelé, la psychologie des personnages est au mieux boiteuse et les situations sont invraisemblables.
Et puis, malgré le film (que je n’ai pas vu), pourquoi avoir changé le titre ? Celui de Philip K. Dick me paraît beaucoup plus intéressant que celui de Ridley Scott : Do Androids dream of electric sheep? (Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?).

16raton-liseur
mar 10, 2011, 3:16 am

13. Par les champs et par les grèves - Gustave Flaubert
Prise d’un brin de nostalgie, j’ai commencé ce livre en espérant trouver de belles descriptions de Bretagne, entendre la langue chanter et évoquer devant mes yeux les paysages de terre et de mer qui me manquent parfois.
Hélas, ce n’est pas ce que Flaubert cherche à faire dans ce livre. En touriste bourgeois et intellectuel sûr de sa supériorité en tout, il prend un ton dédaigneux et hautain pour asséner des jugements sans intérêts. La préface de Pierre-Louis Rey (dans l’édition Pocket) m’avait prévenue, ce livre est étudié parce qu’il montre la genèse du style du futur auteur de Madame Bovary (un autre livre que je n’ai guère apprécié…). Mais peu m’importe l’étude littéraire, ce que je voulais c’était savourer les paysages. En définitive, le livre et moi n’étions pas d’accord sur le voyage à entreprendre, je n’ai pas dépassé Nantes et l’ai laissé continuer sa route seul…

17raton-liseur
Redigeret: mar 11, 2011, 12:30 am

Je m’aperçois que j’ai oublié d’écrire un petit mot sur une BD lue au tout début de l’année. Voilà une erreur réparée…

14. Pico Bogue - Tome 3 - Question d’équilibre - Dominique Roques (Scénario) & Alexis Dormal (Dessins)
L’enfance est un sujet sans fin des bandes dessinées humoristiques de type comic strip. Dominique Roques et Alexis Dormal y vont donc de leur contribution avec cette série, Pico Bogue, centrée sur le personnage éponyme et sa petite sœur.
Mais le créneau est déjà bien occupé, et, faute de renouveler le genre, il leur est difficile de se hisser à la hauteur de leurs aînés. Alors certes, j’ai souri par-ci par-là, mais il manque un regard personnel, une touche particulière… Et mon gamin préféré (pas sûre que j’aimerais être sa mère, mais j’aurais bien aimé être son copain si je n’étais pas une fille…) reste Calvin, avec son inséparable tigre domestique, Hobbes*. Mêlant comique de situation et réflexions amusantes, ce duo autrement plus fantasque fait rire et sourire à chaque page !

* La série des Calvin et Hobbes de Bill Watterson, par exemple le dernier que j’ai acheté (et commencé à lire immédiatement avant de me le faire voler par monsieur Raton), au nom savoureux de The Days are just packed (paru en français sous le titre Complètement surbookés !), il faut regarder la couverture pour comprendre…

18raton-liseur
mar 11, 2011, 6:25 am

15. In Other rooms, other wonders (La saison des mangues introuvables) - Daniyal Mueenuddin
Ce livre est constitué de huit nouvelles, reliées formellement entre elles parce qu’elles mettent en scène des personnes de l’entourage de K.K. Harouni, un vieux propriétaire terrien qui représente l’ancienne classe dirigeante vivant sur ses acquis et selon les codes sociaux traditionnels, incapable de s’adapter au nouveau contexte économique et politique. C’est un monde en transition qui nous est donné à voir dans ces nouvelles.
Mais si la belle couverture jaune et rouge (de l’édition Bloomsbury) et le titre en anglais (littéralement Dans d’autres chambres, d’autres merveilles) laissaient espérer un livre à la langue riche et aux belles images, il n’en ai hélas rien. Les histoires m’ont parues assez convenues, jouant trop souvent sur le registre de la malédiction d’être femme.
Peut-être attendais-je trop de ce livre plutôt court qui, finalement, s’il ne m’a pas emballé, fait un portrait tout à la fois fataliste et réaliste d’une société pakistanaise en transition vers un futur qui n’a pas encore été dessiné.

19raton-liseur
Redigeret: okt 14, 2011, 9:44 pm

16. The Man who invented History - Travels with Herodotus (L’Homme qui inventa l’Histoire - Voyages avec Hérodote*) - Justin Marozzi
The nineteenth-century French philosopher Ernest Renan was quite right, surely, when he wrote that ‘Getting history wrong is an essential part of being a nation.’ Or of being human, he might have added. If they are lessons to heed from studies of the past, they are a gloriously subjective pick-‘n’-mix. Take what you will and dispute the rest. Whatever you want to draw from a particular historical event to your intended course of action is legitimate. Anything suggesting the opposite course of action, however, is a false analogy. (p. 75-76, Partie II, “Iraq”, Chapitre 3, “Fools and Wars”).**
Les livres historiques sont intéressants, mais ce n’est pas la peine de leur faire dire n’importe quoi…
J’ai commencé à lire ce livre en espérant découvrir un pan de l’histoire et un personnage, Hérodote, qui me sont très peu connus. Les voyages d’Hérodote hier et leur parallèle moderne semblaient une façon intéressante d’essayer de comprendre une partie du monde qui fait la une de l’actualité plus souvent qu’à son tour.
Mais si le prétexte pour écrire un livre est bon, il faut savoir l’utiliser. Ici, il semble que ce que l’on connaît d’Hérodote soit trop ténu pour en faire le fil conducteur d’un récit. Alors l’auteur brode, relate des faits sans rapport avec Hérodote, mais cherchant toujours à trouver un lien bien ténu et artificiel pour justifier son écart historique. Cela rend le déploiement des idées plutôt lourd et la lecture plutôt laborieuse.
Et j’ai finalement rendu les armes lorsque l’auteur a convoqué Hérodote pour condamner la guerre en Irak. Certes, on peut faire des parallèles historiques, tirer des leçons… Mais des avis péremptoires et totalement anachroniques tels que « Hérodote aurait été tout à fait opposé à cette guerre » me paraissent déplacés et absolument pas crédibles.
J’ai donc finalement abandonné ce livre après un peu tiers, dommage car quelques réflexions sur l’histoire et son importance auraient pu être intéressantes pour la néophyte que je suis. Néophyte, certes, mais pas dupe d’une démarche intellectuelle pas toujours très honnête à mon goût…

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

** Tentative de traduction personnelle : « Le philosophe français du dix-neuvième siècle Ernest Renan n’avait pas tort lorsqu’il écrivait que « Se tromper sur sa propre histoire est une composante essentielle de la définition d’une nation. » Ou bien la définition de l’humain, aurait-il pu dire. S’il y a des leçons à tirer des études du passé, elles forment un ensemble glorieusement disparate. On retient ce que l’on veut et l’on conteste le reste. Toute leçon d’un évènement historique qui va dans le sens du parti que l’on compte prendre est sérieuse. Au contraire, toute leçon s’y opposant n’est qu’une analogie trompeuse. »

20raton-liseur
Redigeret: sep 22, 2011, 6:26 am

17. Calvin and Hobbes - The Revenge of the baby sat (La revanche du baby-sitté*) - Bill Watterson
Calvin: Bad news, Mom. I promised my soul to the devil this afternoon.
Mom: Oh? That recently?
Calvin et son tigre Hobbes toujours égaux à eux-mêmes… Pas le recueil le plus original, mais bien agréable à lire tout de même !

* Ce livre est traduit en français en deux opus, Fini de rire ! et Allez, on se tire !. Je propose ici une traduction littérale du titre original, que je trouve plutôt drôle…

** Tentative de traduction personnelle :
Calvin : Mauvaise nouvelle, Maman… J’ai promis mon âme au diable cet après-midi.
Maman : Ah ? Ce n’était pas déjà fait ?

21raton-liseur
Redigeret: sep 23, 2011, 3:45 am

18. Terremer - Tome 1 à 4 - Ursula Le Guin
Tome 1/4 - Le sorcier de Terremer
Tome 2/4 - Les Tombeaux d’Atuan
Tome 3/4 - L’ultime rivage
Tome 4/4 - Tehanu

Elle commençait à apprendre le poids de la liberté. C’est un pesant fardeau, et pour l’esprit une charge immense et étrange à assumer. Ce n’est point facile. Ce n’est pas un cadeau que l’on reçoit, mais un choix que l’on fait, et le choix peut être malaisé. La route est escarpée jusqu’à la lumière ; et le voyageur ainsi chargé risque de ne jamais en atteindre le bout. (p. 152, Chapitre XII, “Voyage”, Tome 2, “Les Tombeaux d’Atuan”).
Ecoute-moi, Arren. Tu mourras. Tu ne vivras pas toujours; ni toi, ni personne, ni aucune chose. Rien n’est immortel. Mais il n’y a qu’à nous qu’il est donné de savoir que nous allons mourir. Et c’est un don précieux : c’est la chance d’être soi-même. Car nous ne possédons que ce que nous savons que nous devons perdre, ce que nous acceptons de perdre… Etre soi, c’est notre tourment, notre gloire et notre humanité. (p. 139, Chapitre VIII, “Les Enfants de la Mer Ouverte”, Tome 3, “L'ultime rivage”).
Terremer est une bien étrange collection de livres. Dans un monde fait d’une multitude d’îles qui forment un ensemble cohérent tout en conservant leurs particularités, ce cycle de fantasy est centré sur un personnage, Ged, et différentes étapes de sa vie. Les trois premiers livres peuvent être lus indépendamment les uns des autres, tandis que le quatrième est réellement dans la continuité des tomes deux et trois.
Il est étrange de constater qu’il y a bien peu d’action dans ces livres. Il est surtout question de voyages (en bateau, notamment, à bord du Voitloin), de paysages. L’action ne vient souvent que dans les 50, voire les 20, dernières pages, comme si l’auteur se souvenait que c’était le prétexte du livre et qu’il faudrait bien qu’elle en dise un mot…
C’est donc un livre qu’il faut lire plus pour la construction du monde qui est présenté que pour un bon livre de fantasy classique. Il y a bien de la magie, des dragons et tout et tout, mais c’est plus pour les voir évoluer dans de beaux paysages que pour les voir s’affronter ou affronter le mal qu’il faut lire ce livre.
Si chaque livre est construit de la même façon, ce n’est pas pour autant qu’ils sont identiques. C’est comme si chacun avait son propre thème. En simplifiant, on pourrait dire que :
- Le Sorcier de Terremer est sur l’apprentissage et la connaissance de soi, dans le bien et dans le mal.
- Les tombeaux d’Atuan, sous couvert d’une histoire très sombre, est sur la liberté de choisir sa vie (en opposition à la pré-destination).
- L’Ultime rivage regarde la mort de près et le sens que l’on peut donner à notre propre finitude.
- Tehanu, qui se démarque du reste du cycle, explore la vie simple par rapport à la vie d’aventure et la place de la femme dans la société (avec des thèses qui ne me plaisent pas trop d’ailleurs).

Ce type de livre est une découverte pour moi, pas désagréable, mais je ne suis pas certaine que cela me convertisse tout à fait à ce genre. A lire à petites bouchées, de temps à autre, peut-être…

22Cecilturtle
apr 12, 2011, 5:46 pm

#20 - J'adore Calvin et Hobbes! Je les ai tous lus et relus; j'en ai même fait un sujet de dissertation pour la traduction en français, justement - qui est en général excellente.

23raton-liseur
apr 13, 2011, 12:28 am

#22 - Bonjour Cecilturtle, et merci de t’être arrêtée quelques minutes ici.

Une dissertation sur Calvin et Hobbes !!! Ça, ça m’aurait plu !
J’ai commencé à lire un des recueils en français, et j’ai moins ri je crois, mais il me faudra réessayer pour me faire une opinion plus informée. En tout cas, j’imagine que la traduction ne doit pas être évidente…

24greuh
apr 13, 2011, 4:47 am

J'ai l'intégrale dans la nouvelle série VF, celle avec les couvertures rouges (ils ont retraduit deux-trois phrases et passé du franc à l'euro). J'suis fan. Pour les avoir lus en anglais, la différence est mineure, mis à part les titres.

25raton-liseur
Redigeret: apr 14, 2011, 5:45 am

Je ne savais pas que Calvin et Hobbes étaient aussi populaires !
Sommes-nous sur le point d’ouvrir un fan-club ? J’adhère tout de suite !


A condition que ce ne soit pas le D.E.F.I., Dehors Enormes Filles Informes...

26greuh
apr 13, 2011, 7:01 am

Héhéhé.
Quand j'ai commencé à lire Calvin (en VF), j'étais à peine plus vieux que lui :)

Sinon, la vie de Watterson après Calvin est assez surprenante...

27raton-liseur
apr 13, 2011, 7:09 am

C’était hier donc ! (ou avant-hier ?)

28greuh
apr 13, 2011, 7:19 am

C'était en 1988 (premier album en français, chez Hachette, et ils ne comportaient pas de titre).
http://www.bedetheque.com/serie-566-BD-Calvin-et-Hobbes__2.html#40269

(Wikipedia est incomplet, d'ailleurs, puisqu'il manque les volumes publiés par Hachette, au nombre de 3, avant que Hors Collection ne récupère la série).

29raton-liseur
Redigeret: apr 13, 2011, 11:10 am

Un mordu de la première heure !
J’ai fait le ménage dans les séries de Calvin et Hobbes en anglais et en français il y a peu, j’espère que je n’ai pas fait trop d’erreurs, tu m’as l’air sacrément plus calé que moi dans la production littéraire de ce gamin et son tigre !

30greuh
apr 13, 2011, 9:09 am

Pas tant calé que ça.
Juste que j'ai eu quand j'étais chtiot un exemplaire du premier tome VF à sa sortie (les deux premiers Hachette, en fait). Sachant cela, je suis allé sur bédéthèque.com - très complet - pour trouver la date, et corriger wikipedia.fr sur lequel ces trois volumes manquaient... ;)

Mordu de la première heure, par contre, c'est bien vrai. Mais ce n'est que bien plus tard que j'ai pu m'offrir le reste de la série plutôt que de les emprunter en bibliothèque...

31Cecilturtle
apr 13, 2011, 5:54 pm

Je vais me dater... la série a commencé dans le journal alors que j'étais ado (j'habitais dans l'Ouest du Canada, à l'époque). Tous les jours, je découpais la bédé soigneusement, je la colorais (les noir et blanc) pour les coller sur mon mur. Ma chambre était tapissée - j'ai encore 'mes' originaux dans un classeur quelque part...
J'ai perdu un peu le fil lorsque Waterson a pris sa retraite, mais mon rêve, c'est de posséder un jour le "Trésor", une édition de luxe avec la série complète (The Complete Calvin and Hobbes)!

32greuh
Redigeret: apr 14, 2011, 3:55 am


C'est vrai que cette édition est magnifique, mais elle est en anglais (et je souhaite que les enfants que j'aurai un jour puissent lire la série) et chaque volume est très gros. Les gros volumes, c'est joli sur une étagère, mais inconfortable à lire. C'est mon regret sur les Absolute Sandman : de magnifiques ouvrages, aux planches agrandies, relié skaï embossé, recolorisés, etc. mais pesant un âne mort.

33raton-liseur
Redigeret: apr 14, 2011, 5:44 am

J'ai vu ce coffret dans une librairie à Delhi, la semaine dernière et c'est vrai que ça m'a fait envie... Mais bon, 150 dollars plus le poids, je ne me suis pas laissée tentée. Pas cette fois en tout cas...
Quant aux enfants, il n'est pas certain que ce soit une lecture recommandée, si? J'aurais aimé être le copain de ce gamin à l'imagination sans borne, je ne suis pas certaine de vouloir être sa mère... (quoique...) Sinon, ça fait une bonne incitation pour suivre assidument les cours d'anglais?

34greuh
Redigeret: apr 14, 2011, 7:02 am

Ce n'est pas parce qu'un gamin lit Calvin&Hobbes qu'il va devenir comme ce dernier, hein...
Oui pour les cours d'anglais...

35raton-liseur
aug 24, 2011, 12:09 pm

Voilà plusieurs mois que je me suis fait silencieuse sur cette liste de lecture, et pourtant ce n’est pas faute de lire… Mais la vie réelle reprend parfois ses droits, et je n’ai pas même réussi à me tenir au courant de vos lectures récentes…
Un déménagement (pas tout à fait terminé : les livres sont encore dans les cartons…), un changement de poste et une urgence professionnelle plus tard, me revoici, en pointillés probablement dans les prochaines semaines, plus régulièrement ensuite.
J’ai plus d’une douzaine de critiques en retard et j’ai l’espoir peut-être illusoire de me remettre à jour dans le mois qui vient. En tout cas, je commence aujourd’hui par la traduction de ma critique de Ambrosius Aureliani, un livre envoyé gracieusement par l’auteur en échange d’une critique.

36raton-liseur
Redigeret: sep 6, 2011, 9:53 am

19. Arthurian Tales - Volume 1 - Ambrosius Aureliani (Contes Arthurien - Tome 1 - Ambrosius Aureliani*) - Leon Mintz
Je viens tout juste de finir le premier volume des aventures arthuriennes selon Leon Mintz, et je n’ai pas le sentiment d’avoir terminé un roman. Ambrosius Aureliani ressemble bien plus à une thèse, réécrite pour un public de non-spécialistes (moi par exemple !).Cela est d’autant plus apparent si l’on se réfère à l’annexe de cent pages qui explique les fondements de l’interprétation personnelle de Leon Mintz, une lecture intéressante qui mérite au moins une lecture en diagonale.
Ce livre est très clairement le fruit d’une recherche minutieuse, a l’issue de laquelle Leon Mitz a élaboré sa propre théorie à propose des personnages mythiques que sont Merlin et Ambrosius, l’oncle du Roi Arthur. L’hypothèse principale de Leon Mintz est que ces personnages, qu’aucun d’entre nous (non historiens) ne pourrait classer avec certitude parmi les personnages imaginaires ou réels, sont tout à fait réels et évoluent dans un monde “normal” où leurs faits et gestes soit disant magiques peut être expliqués de la façon la plus rationnelle qu’il soit. Cela peut parfois donner lieu à des théories un peu tarabiscotées, comme le fait que les pouvoirs magiques de Merlin sont en réalité le fruit de cinq ans d’apprentissage des arts martiaux en Chine…
Je ne peux prétendre avoir assez de connaissance sur cette période pour commenter l’interprétation des sources historiques par Leon Mintz, mais j’ai bien aimé tomber sur ses explications rationnelles de mythes que l’on m’a raconté dans mon enfance, comme par exemple la légende de la ville d’Ys ou bien la Table Ronde. Je crois qu’au final je préfère la version de ces légendes qui me tiennent à cœur, mais le fait de savoir que je ne suis pas complètement à côté de la plaque et que même une approche rationnelle peut les expliquer est étrangement réconfortant !

Pour ce qui est de l’écriture, je pourrais suggérer quelques points d’amélioration. Le plus important est certainement l’utilisation d’expressions actuelles tout à fait déplacées dans ce contexte et qui empêchent de se plonger véritablement dans l’histoire. J’ai aussi parfois trouvé des longueurs dans ce roman (ou cette thèse !). Il aurait été possible par endroits de concentrer l’action en moins de paragraphes et d’avoir un rythme plus soutenu.
Il me faut aussi admettre que les nombreuses descriptions de batailles m’ont parfois paru ennuyeuses, mais je suppose que certains passionnés de livres ou romans historiques y trouveront leur bonheur !

Pour conclure, je voudrais adresser mes remerciements à Leon Mintz pour m’avoir envoyé ce livre, qui a connu une odyssée digne d’une épopée arthurienne avant que je n’écrive cette critique ! Je an ai apprécié sa lecture différemment de ce que je pensais.
Je lui souhaite le succès pour son livre, et j’espère qu’il fera preuve de la même passion lorsqu’il écrira le prochain tome !

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

37raton-liseur
Redigeret: sep 6, 2011, 9:54 am

20. Down history's narrow lanes - Sketches and myths of the Kathmandu valley - Kathmandu as it was then (Le long des sentiers de l’histoire - Croquis et mythes de la vallée de Kathmandou - Kathmandou telle qu’elle était alors*) - Desmond Doig ; Dubby Bhagat
Un livre acheté à l’aéroport pour finir mes roupies et pour avoir un livre fait de petites scénettes, commode à lire dans l'avion et me faisant quitter le pays en douceur.
Hélas, le plus intéressant dans ce livre, ce sont les dessins (d’un ami de l’auteur), qui me rappellent des lieux visités, alors que les descriptions sont plus dignes d’un guide touristique poussif que d’un carnet de souvenirs. Je n’ai pas trouvé les points de vue originaux ou les anecdotes que j’espérais, et je n’ai même pas fini le livre. Sans intérêt, ni pour celui qui a visité ces lieux, ni pour celui qui veut rêver…

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

38raton-liseur
Redigeret: sep 23, 2011, 3:50 am

Un livre acheté il y a bien longtemps dans une librairie de Bujumbura, qui méritait bien peu le nom de librairie… Il est difficile de trouver des livres par des auteurs burundais, et la qualité n’est pas toujours au rendez-vous, même si celui-là avait un titre intéressant.

21. La femme au regard triste - Colette Samoya Kirura
« Akaryoshe ntigahora mw’itama. » (Ce qui est sucré ne reste pas dans la bouche). (p. 59, Chapitre II).
Un roman qui veut illustrer la condition de la femme au Burundi dans les années 70. Une période peu facile, marquée par la dualité des valeurs traditionnelles et les sirènes d’une autre civilisation, plus libre et plus permissive, qui semble se développer dans la capitale, mais qui se révèle bien vite n’être qu’un leurre. On n’est libre et tout n’est permis que tant que l’on n’a pas fauté de façon visible (comprendre : tant que l’on ne tombe pas enceinte).
Certes, un temps et un sujet intéressants, mais traités ici avec tous les clichés possibles et imaginables de la femme victime courageuse face aux hommes lâches, libidineux et inconséquents. Dommage que cette histoire, qui oscille entre les collines verdoyantes du centre du pays et les faubourgs grouillants de Bujumbura, n’est pas plus de profondeur et d’originalité. Ce regard triste me laisse surtout l’image d’un féminisme simpliste et mal digéré. Et les expressions en kirundi qui émaillent le texte ne parviennent ni à donner une couleur particulière au roman, ni à faire oublier ses insuffisances.

39raton-liseur
Redigeret: sep 23, 2011, 3:50 am

22. Lait noir - Elif Safak
Une phrase d’Anaïs Nin me revient à l’esprit: « Une vie ordinaire ne m’attire pas. » (…) Elle mena une vie désordonnée et eut toujours plusieurs relations en même temps. Son mari était au courant et fermait les yeux. « La largesse ou l’étroitesse de notre existence dépend de l’audace que nous avons », disait-il.
Mais pourquoi est-ce que nous recherchons, pourquoi est-ce que
je recherche toujours « la largesse de l’existence » à l’extérieur ? Pourquoi suis-je persuadée que la vie devient étriquée lorsqu’elle prend un tour domestique, apprivoisé, et qu’elle est plus vaste lorsqu’elle est chaotique et tournée vers l’extérieur ? Est-ce réellement ainsi ?
- (…)
- (…) A force de réfléchir à l’existence tapageuse de ce genre d’excentrique tu as fini par te persuader qu’on ne peut être à la fois femme, écrivain et normale. Mais ce n’est pas vrai. Tu peux très bien être une personne normale, voire totalement ordinaire. Cela aussi a ses vertus. Tu ne dois pas avoir peur de la normalité.
(p. 157-158, “Passager clandestin”, Partie IV, Chapitre IV).
Plutôt qu’un livre sur la dépression post-partum (comme il est présenté en quatrième de couverture), Lait noir est un livre sur la complexité de l’identité féminine et la difficulté qu’il peut y avoir à concilier les différents aspects de cette identité, en particulier être à la fois mère et écrivain (mais cela s’applique aussi à toute autre carrière dans laquelle une femme veut « s’investir »).
Un sujet intéressant, ici traité par un écrivain femme et turque, connue et reconnue, pouvant peut-être aborder cette question récurrente sous un angle nouveau.
Hélas il n’en est rien, et le livre, malgré quelques passages intéressants, n’apporte guère d’eau au moulin de la réflexion féministe. Il dresse un tableau de la situation assez vraisemblable, où les modèles donnés en exemple aux femmes sont deux extrêmes : soit la femme traditionnelle centrée sur sa famille, soit une super-femme, accomplie dans tous les domaines et n’ayant sacrifié ni sa famille ni sa carrière ni elle-même… Mais ce constat n’a rien de nouveau, et il ne débouche pas ici sur une réflexion nouvelle. D’un style souvent simpliste (comme ces petites dames qui incarnent les différentes facettes d’une même personnalité) et d’une construction bancale, ce livre se lit rapidement, sans laisser grande impression.
Je suis déçue par ce livre d’un auteur pourtant réputé. Je ne sais pas si je dois lui donner une seconde chance et lire un de ses romans, ce livre étant particulier dans son œuvre, puisque basé sur son expérience personnelle, du choix d’avoir un enfant jusqu’à la fin de sa dépression post-partum…

40Cecilturtle
Redigeret: aug 27, 2011, 12:15 pm

J'ai eu un peu la même la même impression que toi pour Lait noir - il me semble qu'elle n'a pas abordé le cœur du sujet et mentionne à peine sa fille, ce que j'ai trouvé pour le moins curieux...

J'ai remarqué que tu as des lectures vraiment très internationales. Dans ce groupe, nous sommes deux (!) à recenser nos lectures par pays, peu importe la nationalité de l'auteur... voici le lien si ça t"intéresse :
http://www.librarything.fr/groups/theglobalchallenge

41raton-liseur
aug 29, 2011, 9:19 am

#40 - Merci Cecilturtle. J’avais vu ce groupe à sa création mais ne m’y suis pas joint pour plusieurs raisons. D’abord, c’est seulement une liste de livres, sans critiques ou notes de lecture, ce qui ne me semble pas le mieux pour provoquer des échanges et donner envie de découvrir de nouveaux livres (je préfère de loin lire ta liste de lecture sur ce groupe-ci !).
Et surtout, je suis membre (pas très active, faute de temps) du groupe Reading Globally, très fréquenté et souvent intéressant. Certains membres y font des listes de lectures dans l’esprit de ce que propose The Global Challenge, mais chacun définit ses propres règles (ce qui donne parfois des choses intéressantes, comme eairo, parti de chez lui à Helsinki et faisant un tour du monde livresque comme s’il le faisait réellement, passant d’un pays au pays voisin, sans forcément parcourir tous les pays, mais en respectant les lois de la géographie. Il est parti en août de l’année dernière et est actuellement en Libye après avoir parcouru une grande partie du continent africain, je ne sais pas quand il sera de retour chez lui !). J’ai pensé à y recenser mes lectures par pays mais n’ai pas trouvé le temps nécessaire pour me lancer. Si c’est le cas un jour, je vous tiendrai au courant !

Enfin, petit clin d’œil, j’espère que vous avez mis votre liste à jour : depuis le 9 juillet dernier, vous avez un pays de plus à visiter, puisque le Soudan du Sud est devenu le 193ème membre de l’ONU. On n’en finit pas de voyager !

42raton-liseur
Redigeret: sep 6, 2011, 9:42 am

23. Le livre de Dina - Herbjørg Wassmo
Tome 1/3 - Les limons vides
Tome 2/3 - Les vivants aussi
Tome 3/3 - Mon bien-aimé est à moi

Un livre court (inutilement séparé en trois volumes par les éditions 10/18) et dense, qui suit Dina, depuis son enfance jusqu’à l’âge mûr. D’un caractère bien trempé et faisant fi des conventions sociales, Dina mène sa vie comme bon lui semble, sans pour autant pouvoir s’affranchir des démons de son passé.
Entière, dans l’amour comme dans la haine, Dina est un personnage qui intrigue, et ce dès les premières pages du roman qui s’ouvrent sur la mort de son mari avant de revenir sur l’enfance et la jeunesse de Dina, jusqu’à cette mort tragique (Les limons vides). Les deux tomes suivants se déroulent après cet évènement, et s’attachent à montrer Dina prenant peu à peu et à sa façon toute personnelle les rênes de la grande ferme qui lui revient.
Je ne suis pas certaine d’avoir trouvé le personnage de Dina attachant. Forte femme, certes, mais pas forcément le type de personne avec lequel il fait bon vivre. Mais le livre a ce souffle particulier des romans d’au-delà du cercle arctique, dans ces contrées ou les grosses fermes sont plus des petits villages qui savent vivre en autarcie pendant une bonne partie de l’année, quand ni les bateaux ni le soleil ne pointent leur nez.
Il donne aussi une idée de la force de caractère nécessaire en ces contrées et en ce temps pour vivre sa vie comme on le veut et non comme la petite société autour de soi s’y attend. Je lirai avec plaisir les autres livres de cette série, qui se penchent sur la vie du fils de Dina (Fils de la providence) et de sa petite-fille (L’Héritage de Karna).

43raton-liseur
aug 30, 2011, 11:10 am

24. Le noyau d’abricot et autres contes - Jean Giono
Peut-être un peu fin ce livre, où la préface est plus longue que les nouvelles du recueil… Ces nouvelles montrent un aspect de Giono que je ne connaissais guère, loin des soleils de la Provence qu’il affectionne particulièrement. Une lecture rapide pour un trajet de train, qui ne me laissera pas grand souvenir.

44raton-liseur
sep 5, 2011, 12:35 pm

25. Amerigo - Récit d’une erreur historique - Stefan Zweig
Je me suis souvent demandé comment il était possible que Christophe Colomb ait découvert l’Amérique. Les découvreurs, qu’ils soient explorateurs ou scientifiques, aiment en général nommer leur trouvaille de leur nom, une façon vaine mais efficace de laisser une marque et d’être remémoré par les générations suivantes.
Dans ce livre, Stefan Zweig propose une lecture des documents d’époque, afin de comprendre comment une telle incongruité a pu se produire. Pourquoi Christophe Colomb n’a pas découvert la Colombie, et pourquoi Amerigo Vespuci n’a rien découvert du tout. Amerigo Vespuci était-il un imposteur usurpant la gloire d’un autre ou tout cela n’est-il qu’un concours de circonstance ?
La théorie de Stefan Zweig est simple et bien étayée : Amerigo Vespuci n’est en rien un imposteur et n’a probablement pas même été au courant du fait que la découverte de ce qui allait se révéler un continent entier lui était attribuée. Mais comme Stefan Zweig l’explique bien mieux que moi, une découverte, ce n’est pas seulement trouver quelque chose de nouveau, c’est aussi prendre la mesure des changements que cela va entraîner. La découverte physique de Colomb n’est rien tant qu’elle n’est pas comprise comme étant celle d’un nouveau continent, qui n’apportera pas les richesses escomptées de l’Inde des épices mais qui ouvre tout un champ de nouvelles possibilités, dont les Espagnols puis les autres puissances coloniales ne tarderont pas à s’emparer.
Un petit livre érudit qui fait voyager dans la littérature des récits de voyages de l’époque et qui se lit sans besoin de connaissances historiques particulières. Pas de grande théorie du complot ou quoi que ce soit dans ce genre, seulement une intéressante dissection des mécanismes sociaux qui donnent leur sens et leur saveur à l’histoire intimidante de nos manuels scolaires.

45raton-liseur
sep 5, 2011, 1:01 pm

26. El Tlacuache / Tlakwatsin (L’opossum*) - Jose Antonio Flores Flarfan
Un gentil petit livre en espagnol et en náhuatl, la principale langue pré-hispanique du Mexique, qui raconte pourquoi le bout de la queue de l’opossum (tlacuache dans l’espagnol mexicain, et non zarigüeya dans l’espagnol d’Espagne) n’a pas (plus) de poils…
Une façon toute simple de se remettre à l’espagnol, une langue que j’ai délaissée pendant trop longtemps, et de me familiariser avec mon nouveau pays d’accueil…

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

46grimm
sep 5, 2011, 4:37 pm

Amerigo me parait tout à fait intéressant, je me le note pour le futur. Arrivée récemment au Mexique ? En parcourant votre profil, je me demandais comment on disait raton-liseur et rat de bibliothèque en espagnol ? ;=)

47raton-liseur
sep 6, 2011, 8:52 am

27. Ubu roi - Alfred Jarry
Un monument du théâtre m’avait-on dit, une critique féroce du totalitarisme… Que n’ai-je entendu sur cette pièce. Je suis très certainement passée à côté de quelque chose, car je n’y ai vu qu’une farce potache et un humour pesant. C’est bête et sans intérêt, et je n’irai certainement pas perdre une soirée au théâtre pour cela…

48raton-liseur
sep 6, 2011, 8:53 am

28. La Belle du Caire - Naguib Mahfouz
Un livre sur l’ambition et le désir de s’en sortir à tout prix. Faire fi des règles morales et sociales, se jouer de tout et de tous, et en être secrètement fier. Voici un livre qui met mal à l’aise en montrant l’impossibilité de conjuguer ascension sociale et honnêteté, opulence et moralité.
Même s’il n’est pas le meilleur livre de Naguib Mahfouz (je lui ai de loin préféré La Chanson des gueux), j’y ai retrouvé avec plaisir sa plume simple et factuelle, qui dit et décrit sans détour une société qui se cherche dans l’Egypte des années 30.

49raton-liseur
Redigeret: sep 6, 2011, 9:18 am

29. L’Orange de Noël - Michel Peyramaure
Un roman gentillet sur l’arrivée d’une « hussarde de la République » dans un petit village de Corrèze, au tournant du XXème siècle. La belle gagnera bien sûr le respect des habitants et trouvera l’amour, mais le lecteur n’apprendra rien des conditions de vie à cette époque ni des changements qui se préparent dans notre société.
Une lecture qui a occupé quelques heures mon esprit fatigué, mais aussi vite oubliée que le livre est fermé. Dommage…

50raton-liseur
sep 6, 2011, 9:14 am

30. Le Bal des célibataires - Michel Peyramaure
Il a été tiré un téléfilm de L’Orange de Noël, dont on a cru bon de tirer une suite. Et l’auteur du livre original, Michel Peyramaure, a cru bon d’en tirer à son tour un livre. Que ce soient les scénaristes ou l’auteur, ils auraient tout de même pu respecter la continuité de l’histoire et ne pas ressusciter les morts…
Indépendamment du premier livre (que j’ai d’ailleurs lu ensuite), l’idée de ce livre me plaisait. Comment reconstruire une vie, une société dans un village saigné par la guerre, et l’on sait que les villages français ont payé un tribut plus lourd que les villes lors de la Première Guerre Mondiale. Mais si ce sujet est le titre du livre, il n’est pas véritablement abordé. Certes, un bal est organisé, où se rencontrent des paysannes veuves ou seules et des hommes venus de la ville, mais c’est plus une parodie de « Tournez Manège » qu’un roman qui apprendrait quoi que ce soit. Ce livre promettait plus qu’il n’a tenu, je suis déçue et l’on ne m’y reprendra pas…

51raton-liseur
sep 7, 2011, 9:29 am

31. Galveston - Volume 3 - Far Western Civil War (Gavelston*) - P.G. Nagle
Troisième tome d’un roman historique (dont je n’ai pas lu les précédents volumes), cette histoire se passe au Texas, lors de ce que les Américains appellent pudiquement « Civil War » (la Guerre Civile) et que les Français désignent plus brutalement comme la « Guerre de Sécession ». Des heures sombres de l’histoire des Etats-Unis, qui ont marqué une nation en devenir.
Hélas, on n’y apprend pas grand-chose, sinon que l’abolition de l’esclavage n’était certainement pas le point de départ de la guerre comme l’historiographie veut parfois nous le faire accroire, et que les unionistes n’étaient pas tous des abolitionnistes, loin de là (mais il m’a fallu lire l’article de Wikipédia pour mieux comprendre cette question).
L’histoire manque de souffle et apparait comme une pale réécriture de la romanesque fuite de Scarlett O’Hara lors de la prise d’Atlanta par les Nordistes dans Autant en emporte le vent. Il est cette fois question de la trop sage et terne Emma qui, prenant soin de sa tante à Galveston, une ville de la côte texane, se retrouve entre les feux des Confédérés et des Unionistes. Mais il manque décidemment le fougueux Rhett Butler et les vives descriptions de la ville en flamme ; je préfère de loin l’original, plutôt que cette version édulcorée…

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

52raton-liseur
Redigeret: sep 26, 2011, 5:39 pm

32. Feminist fairy tales (Contes de fées féministes*) - Barbara G. Walker
So they married (...). They governed peacefully because the prince was wise enough to defer to [his wife] Gorga’s greater wisdom. In this way, they lived happily ever after. (p. 34, “Gorga and the dragon”).**
Une bonne idée que celle de Barbara Walker de réécrire les contes de notre enfance en leur donnant une tonalité féministe. Certains de ces contes sont d’ailleurs plutôt bien vus et font sourire.
Mais je crains de ne pas avoir la même définition du féminisme que cette égérie du tricot (eh oui, c’est ce qu’elle fait, de façon professionnelle, quand elle n’étudie pas la mythologie ! Comme quoi, on peut avoir une activité stéréotypement féminine – je m’excuse du néologisme – et être féministe convaincue !). En effet, je ne pense pas qu’il y ait des valeurs masculines et d’autres féminines, et je ne crois pas que le monde serait meilleur s’il était dominé par des femmes. Ni mieux, ni pire…
De plus, ce travail de réécriture déplace souvent l’histoire originale dans un soi-disant âge d’or pré-chrétien où le matriarcat et les valeurs positives du féminisme régnaient. Et inévitablement, c’est l’image de la femme donneuse de vie qui est exaltée. Mais être femme se réduit-il à cela, est-elle essentiel d’être mère pour être femme ? Cela me parait à la fois bien réducteur et bien peu féministe aussi.
Au final, malgré quelques nouvelles bien menées, j’ai trouvé que Barbara Walker a souvent recours aux mêmes procédés et cette lecture a fini par me lasser. Le féminisme a encore du chemin à faire !

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

** Tentative de traduction personnelle : « Et ils se marièrent (…). Ils gouvernèrent dans la paix car le prince était assez sage pour s’en remettre à la sagesse encore plus grande de [sa femme] Gorga. C’est ainsi qu’ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. »

53raton-liseur
sep 15, 2011, 11:29 am

# 46 – Amerigo est effectivement un livre intéressant. Je trouve que ça fait très intello de lire des livres historiques de Zweig (en y réfléchissant, j’ai cette même sensation avec beaucoup d’auteurs Allemands du tournant du siècle, je ne sais pas pourquoi…), mais ça fait du bien de temps en temps de lire cette écriture lisse, qui coule si facilement.

Pour ce qui est de la traduction de Raton-Liseur en espagnol, je n’ai pas encore trouvé. Et mon espagnol n’est pas encore assez bon pour que je traduise mon profil dans cette langue, mais j’y travaille !
Un rat de bibliothèque est tout simplement un ratón de biblioceta (mais je ne suis pas certaine que cette expression soit d’usage aussi fréquent qu’en français) et un raton-laveur est un mapache (intéressante similarité dans la sonorité avec le Tlacuache, l’opposum – cf. message 45). Il va me falloir un peu de temps pour trouver une traduction qui reprend le jeu de mots de mon pseudonyme... Avis aux traducteurs amateurs !

54raton-liseur
Redigeret: sep 18, 2011, 12:45 pm

33. Fairy rebels - Volume 1 - Knife* (Lame**) - R.J. Anderson
J’ai hésité avant d’acheter ce livre. Les couvertures de l’édition anglaise de Orchard Book, avec une petite fée brillante sur fond noir, attirent l’œil, mais les titres me paraissent un peu guerriers (les trois volumes parus à ce jour ont pour titres Knife, Rebel et Arrow*, respectivement Lame, Rebelle et Flèche). Mais je n’ai finalement pas pu résister à l’air mutin de Knife, la petite fée bleue…
Et je n’ai pas regretté ! Ce livre est un véritable plaisir, « no ordinary fairy tale » (un conte de fée pas comme les autres) comme dit le slogan bêtement accrocheur de la quatrième de couverture. Imaginez les fées ayant perdu leur magie, recluses dans un vieux Chêne dont elles ont peur de sortir, effrayées par les menaces que cache le monde qui les entoure, de la corneille qui aimerait les croquer aux inquiétants humains…
Le roman se passe à l’heure actuelle et montre une fée plus tête brûlée que les autres, qui, attirée par l’interdit ou par l’inconnu, affronte ce monde étrange et inquiétant et qui, du fait de ses expériences, cherche petit à petit à comprendre le passé de sa petite communauté et pourquoi celle-ci est aujourd’hui sur le déclin.
Les épreuves mais aussi les moments de découverte émerveillée ne manqueront pas, l’histoire est très bien menée et les révélations, sans être sensationnelles, donnent un rythme au livre sans en faire une histoire impossible. Le lecteur est tenu en haleine jusqu’au bout, et c’est une belle leçon sur ce qu’est devenir soi-même, faire des choix et affronter ses peurs, mais il est aussi question de tension entre sens du devoir et liberté individuelle, entre différence et complémentarité. Et le livre amène à se poser des questions sur ces thématiques, sans tomber dans le travers de fournir des réponses toutes faites et péremptoires.
Une véritable réussite, une merveilleuse lecture qui m’a tenue en haleine. Un livre que je pourrais relire pour mieux en comprendre les ressorts et mieux savourer la complexité des situations et des décisions que doit prendre ce petit bout de femme (pardon, de fée) qu’est Knife. Un livre que j’offrirai probablement autour de moi, dès qu’il sera traduit en français, un livre pour enfants et grands enfants comme je les aime !

* Les livres de cette série ont des titres différents en Angleterre et aux Etats-Unis. J’utilise les titres anglais, ceux de l’édition que je possède, mais les livres sont répertoriés dans BiblioChose sous leur titre américain. Les liens sont donc :
Tome 1 – Knife (titre choisi par l’auteur et conservé pour l’édition anglaise) ou Spell Hunter (titre pour l’édition américaine)
Tome 2 – Rebel (titre pour l’édition anglaise) ou Wayfarer (titre choisi par l’auteur et conservé pour l’édition américaine)
Tome 3 – Arrow (Knife) (tant pour l’édition anglaise qu’américaine).

** A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

55raton-liseur
Redigeret: sep 19, 2011, 8:20 am

34. Fairy rebels - Volume 2 - Rebel* (Rebelle**) - R.J. Anderson
J’ai lu le deuxième volet de l’histoire du petit peuple du Chêne dans la foulée du premier, Knife* (Lame), curieuse de voir la suite qui pouvait être donnée à ce livre et ayant quitté les personnages à un moment charnière pour la compréhension de leur passé et de leur déclin.
Beaucoup de nouvelles découvertes et de révélations sur le monde des fées et son organisation. De ce point de vue, c’est un livre dans la veine du premier, même si le personnage principal, Linden, m’a paru moins attachant que Knife.
Cependant, j’ai été gênée par la mention insistante de la religion dans ce livre (R. J. Anderson est chrétienne, cela est mentionné dans ses remerciements à la fin du premier tome…). Un des personnages principaux, du côté des humains, est un jeune adolescent dont la foi vacille. Certes, le livre ne tranche pas, ne prêche pas, mais j’ai trouvé le besoin de glisser la religion dans ce livre comme un peu déplacé et par trop américain à mon sens (l’auteur est Canadienne).
Cela ne m’empêchera cependant pas de lire les tomes suivants. Je fais une pause avant de me plonger dans Arrow* (Flèche) car les deux premiers tomes ont une véritable continuation, alors que j’ai l’impression que Arrow explore une autre voie. Et puis il faut que je tienne jusqu’au printemps 2012, date à laquelle la sortie du quatrième tome (intitulé Swift, faut-il le traduire « Martinet » ou « Rapide, Furtif » ?) est prévue. Malgré les petites déceptions de ce tome, je ne suis pas prête à abandonner le petit peuple du Chêne !

* Les livres de cette série ont des titres différents en Angleterre et aux Etats-Unis. J’utilise les titres anglais, ceux de l’édition que je possède, mais les livres sont répertoriés dans BiblioChose sous leur titre américain. Les liens sont donc :
Tome 1 – Knife (titre choisi par l’auteur et conservé pour l’édition anglaise) ou Spell Hunter (titre pour l’édition américaine)
Tome 2 – Rebel (titre pour l’édition anglaise) ou Wayfarer (titre choisi par l’auteur et conservé pour l’édition américaine)
Tome 3 – Arrow (Knife) (tant pour l’édition anglaise qu’américaine).

** A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

56raton-liseur
sep 21, 2011, 2:09 pm

Vous allez peut-être trouver que je lis beaucoup de livres pour enfants ces temps-ci, et le prochain est pour une audience bien plus jeune que les deux précédents ! Je m’aperçois que c’est vraiment la littérature que je préfère quand je veux un livre facile, plus que les romances (qui me déçoivent souvent) et certainement plus que les romans policiers qui ne sont pas du tout ma tasse de thé (quoique, après avoir lu cela, vous serez étonnés par une critique à venir…).
Toujours est-il que lorsque le travail ou toute autre préoccupation prend le dessus, les livres pour enfants sont ce que je trouve de plus agréable à lire, et la bonne découverte de Knife ne me donne qu’envie de continuer à explorer ces rayons de librairie, qui sont plein d’agréables découvertes. Il ne me reste plus qu’à me mettre les traduire pour les faire partager !...

57raton-liseur
Redigeret: sep 26, 2011, 5:40 pm

35. Hiccup Horrendous Haddock III - Volume 1 - How to train your dragon (Comment dresser votre dragon) - Cressida Cowell
And that, my friends, that, is the Hard Way to Become a Hero. (p. 219, Chapitre 19, “Hiccup the Useful”).*
Un livre simple aux drôles de dessins juste esquissés, presque griffonés, où le personnage principal n’est pas un héros-né et a bien du mal à trouver sa place dans son village de Vikings bourrus sur une petite île ventée entourée d’une mer tourmentée. Il faudra que le village soit menacé par un immense dragon pour que son inventivité devienne un atout et sauve tout le monde... Comme le dit ce livre, les temps changent, et ce ne sont plus seulement les gros bras qui font les héros. Tout le monde peut être un héros, et seuls ceux qui ont bon cœur sont de vrais héros. Un gentil message délivré d’une façon simple et ludique.

J’ai acheté ce livre parce que le nom de son héros, Hiccup (Hoquet), m’a attirée. Et puis, bien-sûr, je voulais savoir comment élever mon prochain compagnon à écailles… Je ne pense pas que je suivrai les aventures au long cours de Hiccup (il y a à ce jour 8 tomes de ses aventures), peut-être suis-je un peu trop vieille pour cela (hélas…), mais c’est une bonne lecture pour garçons et garçons manqués de 7 ou 8 ans.

* Tentative de traduction personnelle : « Et cela, mes amis, cela, c’est Devenir un Héros Malgré Tout »

58raton-liseur
Redigeret: sep 26, 2011, 5:37 pm

36. A Guide to the Birds of East Africa (Le pari des guetteurs de plumes africaines) - Nicholas Drayson
There is something about birds, their beauty and freedom, that is good for a man’s soul. But a man who is saving money to buy a farm and build a house cannot afford to fritter away his shillings on buses or matatus just to get out of town for the morning, even if it is for his soul. (p. 19, Chapitre 19, “Guineafowl”).*
Un livre que j’ai repéré parce qu’il a le même titre qu’un autre livre dont nous avons tellement feuilleté dans tous les sens que la poussière des safaris s’est incrustée de façon indélébile dans ses pages, Birds of East Africa de Terry Stevenson et al. Le titre de l’édition française, qui me paraît bien alambiqué, ne permet pas de lire une bluette en faisant semblant de lire un très sérieux traité d’ornithologie…
Car c’est effectivement d’une bluette qu’il s’agit. Une histoire d’amour qui se développe au fil des promenades ornithologiques hebdomadaires de Nairobi. L’auteur part d’éléments réels, ces promenades existent effectivement (bien qu’elles soient le mercredi ou le jeudi me semble-t-il, et non le mardi comme dans le livre), et l’on reconnaît les lieux dont il est question (la géographie est respectée, même si les noms sont souvent écornés à dessein, comme un clin d’œil à qui connaît un peu la ville). Et autour de ces faits concrets, il brode une histoire sans prétention, même s’il se donne parfois un ton critique, dont le ton convenu et superficiel est ce qui permet d’en sourire.
Mais le côté original de cette romance (des personnages d’une soixante d’années, très peu d’Africains de souche…) en fait une agréable et légère lecture. Et j’ai aimé ce regard décalé et ornithologique sur Nairobi. Un Nairobi qui se fait de plus en plus rare, celui des mousebirds et des sunbirds, les colious et les souimangas, (que l’on traduirait littéralement les oiseaux-souris et les oiseaux-lumière), ces oiseaux des haies de Nairobi, celui des jacarandas aux éblouissantes floraisons mauves, majestueux arbres coupés les uns après les autres pour faire place à de nouveaux blocs d’immeubles. Une bonne lecture pour un samedi matin paresseux et nostalgique sur une terrasse de Nairobi…

* Tentative de traduction personnelle : « Il y a quelque chose chez les oiseaux, leur beauté, leur liberté, qui fait du bien à l’âme humaine. Mais un homme qui économise pour acheter un lopin de terre et y construire une maison ne peut se permettre de gaspiller ne serait-ce que quelques shillings en bus ou matatus pour une promenade matinale à l’extérieur de la ville, même si c’est pour le bien de son âme. »

59raton-liseur
Redigeret: sep 26, 2011, 6:38 pm

37. The City & the City (The City & the City*) - China Miéville
If someone needed to go to a house physically next door to their own but in the neighbouring city, it was in a different road in an unfriendly power. (...)
But pass through Copula Hall and she or he might leave Besźel, and at the end of the hall come back to exactly (corporeally) where they had just been, but in another country, a tourist, a marvelling visitor, to a street they had always unseen, to the Ul Qoman house sitting next to and a whole city away from their own building, unvisible there now they had come through, all the way across the Breach, back home.
(p. 86, Chapitre 6, Partie I, “Besźel”).**
It must be an intoxication to step through the borders and greet their foreign comrades across what they made suddenly one street, to make their own country even if just for seconds at night in front of a scrawled slogan and a broken window. They must know by now that the populaces were not coming with them, but they did not disappear back to their respective cities. How could they go back now? Honour, despair, or bravery kept them coming. (p. 335, Chapitre 27, Partie III, “Breach”).***
Comment commencer ? Dire que c’est un polar ? Ce n’en est pas tout à fait un tant l’enquête est plus un prétexte qu’autre chose ? Dire que c’est de la science-fiction ? Mais en est-ce vraiment, cela paraît à la fois tellement aberrant et familier… Que dire pour donner envie de lire ce livre absolument génial et singulier sans rien dire, pour ne pas dévoiler ce qui en fait tout l’intérêt, à savoir la découverte, page après page, d’un univers étrange, impossible, et qui pourtant en dit bien long sur notre monde…
Miéville a une maîtrise de son univers et de son écriture qui coupent le souffle et, sans jamais donner de leçons, il peint l’absurdité de notre monde et donne à réfléchir sans avoir l’air d’y toucher. On pense aux Berlin de la guerre froide, à la Yougoslavie qui implose, au concept de choc des civilisations par le prisme duquel on veut nous expliquer le monde actuel. On pense à tout ce que nous préférons invoir dans nos villes à nous, lorsque nous détourner la tête plutôt que de vivre ensemble.
Est-ce notre futur, une dystopie, ou une caricature de notre présent ? Un peu de tout cela probablement, et cela donne un livre haletant et qui met mal à l’aise. Mal à l’aise de voir exposé si crument, sans fard, poussée à l’extrême, l’incongruité de nos sociétés. Et, bien que Miéville soit engagé politiquement (très à gauche), jamais il ne devient moralisateur, il ne donne pas de solution, n’accuse pas, il se contente de dépeindre, au lecteur d’en faire ce qu’il veut.
Est-ce assez pour donner envie de lire ce livre ? Est-ce le bon équilibre entre dire et ne pas dire ? Voilà une critique que j’espère avoir réussi à écrire pour qu’au moins quelques lecteurs, qu’ils soient habitués des polars ou non, aient envie de lire ce livre, car la plongée dans ce monde schizophrène, inquiétant et familier, est une expérience dont on ne ressort pas indemne.

* La parution de ce livre en France est prévue pour octobre 2011, aux éditions du Fleuve Noir. Il semble qu’il soit prévu de lui conserver son titre anglais. J’imagine que la traduction n’a pas été aisée et j’espère qu’elle sera à la hauteur de l’original.

** Tentative de traduction personnelle : « Si quelqu’un devait se rendre dans une maison physiquement voisine de la sienne mais dans la ville autre, c’était une autre rue, un monde hostile. (…)
Mais en passant par le Siège de la Copule, cette personne pouvait quitter Beszél et, à la sortie, revenir à l’endroit (corporellement) exact qu’elle venait de quitter, mais dans un autre pays, touriste, visiteur émerveillé, dans une rue jusqu’alors toujours invue, dans une maison Ul Qomanienne située tout à côté et à toute une ville de distance de sa propre maison, celle-ci devenue invisible maintenant qu’elle est de l’autre côté, de l’autre côté de la Faille, là-bas chez soi. »

*** Tentative de traduction personnelle : « Ce devait être enivrant de passer par-delà les frontières et de saluer leurs camarades étrangers de l’autre côté de ce qui devenait tout à coup une rue, de créer leur propre pays même si ce n’était que pour quelques secondes, de nuit, avec pour seuls témoins un slogan hâtivement griffonné et une fenêtre cassée. Ils devaient savoir maintenant que la population ne les rejoindrait pas, mais ils ne se repliaient pas pour autant dans leurs villes respectives. Comment auraient-ils pu revenir en arrière maintenant ? L’honneur, le désespoir ou le courage les poussaient de l’avant. »

60raton-liseur
okt 10, 2011, 6:43 pm

38. Somewhere, Home (Quelque part, une maison*) - Nada Awar Jarrar
The cities of the West became her refuge. She walked their streets with confidence, slipping myriad cultures into her pockets and learning how to smile in several languages. She was faceless one moment and shining the next, and in her manner no secrets were revealed. (p. 77, Partie II).**
Un joli petit livre qui se lit comme on laisse fondre un bonbon doux-amer sur la langue. Plus qu’un roman, ce sont trois nouvelles, trois histoires de femmes qui ne se connaissent pas mais qu’une maison, habitée ou vue un jour, relit sans qu’elles le sachent. Trois femmes que l’on suit dans leur quête de racines, d’identité. L’une cherche sa place et la juste distance par rapport à son histoire familiale, la seconde est une immigrée qui se cherche entre Liban et Occident, et la troisième se souvient de sa vie itinérante et de sa famille éparpillée dans le monde.
Un joli livre, d’une écriture poétique, qui suggère plus qu’elle ne dit, qui caresse ses personnages et leur donne une portée symbolique. Qu’il soit question de migration économique ou politique, ou tout simplement d’histoire familiale se dissolvant dans les changements de mode de vie, chacun tente au mieux de se réconcilier avec son héritage culturel, au prix d’illusions et d’espérances parfois déçues.

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

** Tentative de traduction personnelle : « Les villes occidentales devinrent son refuge. Elle arpentait leurs rues avec confiance, une multitude de cultures s’entrechoquant dans ses poches and apprenant à sourire dans plusieurs langues. Elle était sans visage par moment et brillante le suivant, et son attitude ne dévoilait aucun secret. »

61raton-liseur
okt 10, 2011, 6:56 pm

Une jolie citation pour les lecteurs que nous sommes, relevée dans le livre Somewhere, Home de Nada Awar Jarrar.
‘Aida, how many stories are there in one book?’ Dina asked one day as the two girls sat reading in the bookshop.
Aida fingered the large picture book that lay open on her knees, its weight her comfort, and shrugged her shoulders. ‘As many as we like, Dina,’ she said after a pause. ‘Just as many as we like.’
(p. 90, Partie II).
Tentative de traduction : « Aida, combien y a-t-il d’histoires dans un seul livre ? demanda Dina un jour que les deux filles étaient assises à lire dans la librairie.
Aida passa sa main sur le grand live d’images ouvert sur ses genoux, dont le poids la réconfortait et elle frissonna. “Autant que l’on veut, Dina, répondit-elle au bout d’un moment. Exactement autant que l’on veut.” »

62raton-liseur
okt 17, 2011, 6:13 pm

39. A Single swallow - Following an epic journey from South Africa to South-Wales (Le printemps d’une hirondelle*) - Horatio Clare
I felt a strange mixture of freedom and pointlessness. The self-containment of the solitary traveller gives you an other-worldly, off-to-one-side lightness of being. (...) The irrelevance of the traveller, your absence of responsibility, most of the time, for anything but yourself is a strange condition. You might as well be a ghost. (p. 27, Chapitre 1, “South Africa: Travelling companions”).**
J’ai persévéré pourtant. J’ai lu plus de la moitié du livre, mais, dans ce voyage qui part de l'Afrique du Sud pour se terminer dans la campagne galloise, j’ai abandonné la migration des hirondelles aux portes du Cameroun.
L’idée était bonne, en tout cas me plaisait. Je me souviens d’un article dans une revue scientifique, La Recherche, il y a un an ou deux décrivant à quel point la compréhension des phénomènes migratoires était limitée. Un de ces mystères de la nature que la recherche n’a pas encore tout à fait percé. Alors, observer ce phénomène du point de vue du voyageur, suivre les hirondelles rustiques (Hirondo rustica) quand elles viennent faire le printemps chez nous, c’était une très belle idée.
Hélas, si Horatio Clare suit effectivement le chemin des hirondelles, il est bien peu question oiseaux, de nature, de paysages dans ces pages. Ce sont les aspects triviaux du voyage qui sont décrits : les moyens de transport, les rencontres dans les bars, les ennuis avec la douane… C’est M. Clare lui-même qui est le personnage principal de ce livre, pas les hirondelles.
Certains apprécieront peut-être ce livre, mais ce n’est pas la littérature de voyage que moi j’apprécie. J’aime quand c’est ce qui entoure le voyage lui-même qui est le centre du récit, quand le voyageur sait s’effacer juste ce qu’il faut derrière les événements, les rencontres, les paysages. Ici, il y a trop de sentiments factices et pas assez d’hirondelles pour que le livre soit intéressant.

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

** Tentative de traduction personnelle : « Je ressentais un étrange mélange de liberté et d’absurdité. L’indépendance du voyageur solitaire lui donne une légèreté hors du monde, décalée. (…) L’inutilité du voyageur, son absence de responsabilités, la plupart du temps, pour autre chose que lui-même est un état bien étrange. Il pourrait tout autant être un fantôme. »

63raton-liseur
okt 17, 2011, 6:15 pm

40. Skin of Giants (Dans la peau des géants*) - Mike Cooley
Un livre électronique mis à disposition gratuitement par son auteur pour en promouvoir le lancement.
Skin of Giants est un recueil de nouvelles de science fiction. L’auteur revendique une parenté intellectuelle avec Theodore Sturgeon, mon auteur de science fiction préféré, et je comprends ce qu’il veut dire par là : dans plusieurs nouvelles, la science fiction n’est pas une fin en soi, mais est utilisée pour développer une métaphore de notre monde. Mais, bien qu’il y ait plusieurs idées intéressantes, je dois admettre que je n’ai pas été totalement convaincue par ce livre, et tout au long de la lecture j’ai eu le sentiment qu’il manquait toujours un quelque chose pour que l’histoire fasse mouche.
J’aimerais tout de même recommander la lecture de ce livre à toute personne qui aime la bonne science fiction et qui veut encourager les efforts d’un écrivain en devenir et qui a un réel potentiel. Et j’espère que Mike Cooley continuera à travailler ses nouvelles, peaufinant ses intrigues et son style, car je suis certaine qu’il sera bientôt l’auteur de livres que j’aurai plaisir à lire.

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

64raton-liseur
okt 17, 2011, 6:19 pm

41. The Books of Beginning - Volume 1 – The Emerald Atlas (L’Atlas d’émeraude) – John Stephens
“Yes, if we confront the witch and fail, we are doomed. All we are, all our history, all our stories, will be wiped from the memory of the world. And yet”-she turned slowly, looking across the congregation-“we have no choice but to fight.” (p. 255, Chapitre 15, “To the Dead City”).*
Un livre d’enfant qui parle d’un atlas, comment résister ? J’ai lu ce livre d’une traite ou presque, mais il ne me laissera pas un grand souvenir. Il manque ce je-ne-sais-quoi qui le rendrait unique, qui en ferait un vraiment bon livre.
En effet, le livre est prenant, il passe d’un rebondissement à l’autre et est assez bien écrit pour que l’on est du mal à s’arrêter à la fin d’un chapitre. Mais les personnages sont un peu trop archétypaux et prévisibles, ils manquent de profondeur et le livre d’une subtile invitation à la réflexion qui fait (d’après moi) le charme des bons livres pour enfants. Peut-être le fait que l’auteur de ce livre soit un scénariste de séries télévisées explique partiellement la construction de ce livre qui m’a laissée sur ma faim.
J’ai cependant aimé l’idée qu’une civilisation doit lutter pour rester en accord avec elle-même et ses principes, même si cela doit signifier sa destruction, quelque chose qui revient à plusieurs reprises et qui va à l’encontre de certains discours. Je lirai probablement les deux tomes suivants, même si je pense savoir ce qu’il y aura dedans, mais cela me fera passer un bon moment, sans avoir à faire trop marcher mes cellules grises…

* Tentative de traduction personnelle : « Oui, si nous nous soulevons contre la sorcière et que nous échouons, nous sommes perdus. Tout ce que nous sommes, toute notre histoire, toutes nos légendes, seront effacés de la surface du monde. Et pourtant, dit elle en tournant doucement sur elle-même, regardant l’assemblée, nous n’avons d’autre chose que de nous battre. »

65raton-liseur
okt 17, 2011, 6:22 pm

42. Dans la mer il y a des crocodiles – L’histoire vraie d’Enaiatollah Akbari – Fabio Geda
Il voulait me passer quelqu’un au téléphone. (…) J’ai dit: Maman. (…)
Du combiné est arrivé un souffle léger, humide et salé. Alors j’ai compris qu’elle pleurait, elle aussi. (…) Ce sel et ces soupirs étaient tout ce qu’une mère et un fils peuvent se dire, après tant d’années. Nous sommes restés comme ça, en silence, jusqu’à ce que la communication soit interrompue.
(p. 174, Chapitre 6, “Italie”).
Il est rare que l’on dise d’un livre qu’il est trop court, pourtant c’est ici le cas. Du haut de ses 170 pages, ce récit raconte beaucoup : cinq ou six ans de la vie d’un enfant qui devient homme en traversant six pays, immigré clandestin qui espère toujours que plus loin sera mieux. Fabio Geda a fait tout le travail de la mise en forme de ce récit vrai, lui donnant la poésie d’un langage d’ailleurs (les enfants ne sont pas plus grands que les chèvres, et non hauts comme trois pommes) et toute la naïveté d’un regard d’enfant (qui d’ailleurs évolue au fur et à mesure qu’Enaiatollah prend de l’âge). Mais hélas, tout n’est qu’effleuré, une expulsion est vite remplacée par un voyage clandestin en bus, une traversée des montagnes par celle de la mer Egée).
Je suis ressortie de ce livre avec un sentiment de faim non rassasiée et la confirmation que l’immigration clandestine est une impossible aventure dans laquelle seuls les plus désespérés ou les plus inconscients se lancent.

Recommandation : J’ai ajouté une « recommandation » qui peut sembler un peu étrange à première vue, puisque j’ai associé ce livre à Maus, de Art Spiegelman, la célèbre bande dessinée sur les camps de concentrations. Ce livre a été une claque, je l’ai lu en quelques jours, mais en devant faire des pauses fréquentes, certains dessins étant par moment difficile à accepter (comme le plan tout simple, mécanistique, d’une chambre à gaz).
Je rapproche Dans la mer il y a des crocodiles, bien plus facile à lire, de Maus parce que tous les deux illustrent cette constante que, dans les drames humains à la fois individuels et collectifs, ce ne sont pas les meilleurs qui survivent, seulement les plus chanceux, ceux qui passent à travers les gouttes, ni plus courageux (ni moins), ni plus ingénieux, sans mérite ou propos particulier, seulement les plus chanceux.

66raton-liseur
okt 19, 2011, 1:57 pm

43. Il me tarde tant… - Moritz Petz; Quentin Gréban
Je pensais offrir ce livre à plus jeune que moi, mais finalement je n’en ferai rien. Cette histoire d’amour de Mademoiselle Souris et de Monsieur Hérisson, séparés par un voyage et qui ne peuvent s’empêcher de penser l’un à l’autre et de continuer à tisser leur amour malgré les jours et les kilomètres me rappellent tellement notre histoire à moi et Monsieur Raton, que je le garde pour nous.
De jolis dessins tous doux, des mots simples qui sonnent juste, une belle façon de dire que même les voyageurs sont capables d’amour...

67raton-liseur
okt 19, 2011, 2:02 pm

44. La fête de l’ours - Jordi Soler
En réalité, on peut faire très peu de chose contre l’oubli, ériger un monument, apposer une plaque, écrire un livre, organiser une causerie et à peine plus, ce qui est naturel, justement étant d’oublier, et sur ce point, et à ce moment de l’histoire que je raconte, je me demande : et si tout ce qui se rapporte à cette putain de guerre et à ses séquelles n’était qu’un poids mort ? (p. 37, Chapitre 2).
Jordi Soler n’a qu’une obsession, la Guerre d’Espagne et ses ramifications jusqu’à aujourd’hui. Ses trois livres traduits en français (celui-ci est le deuxième que je lis) ressassent inlassablement ce sujet. Bien que romans, ils sont écrits à la première personne, et je ne saurais démêler la part de l’expérience personnelle de celle de l’imagination.
Ce livre s’attaque à un sujet peu traité, celui de la part sombre des protagonistes d’un conflit, même s’ils sont du « bon côté », du côté des gentils. Non, il n’est pas question de purges et de règlements de compte, juste d’un individu qui ne se conforme pas à l’image d’Epinal du bon soldat.
Sujet tabou, mais tabou que Jordi Soler ne brise pas tout à fait. Quand il est héros, son personnage, Oriol, n’est qu’un piètre héros et quand il est salaud, il n’est pas un salaud de bien grande envergure. Ne me faites pas dire ce que je n’écris pas, mais bon des vols et un accident, ça ne fait pas vraiment un salaud. Alors certes, le questionnement sur l’intérêt de fouiller le passé, de ressasser les vieilles histoires, de vouloir à tout prix connaître la vérité est intéressant, bien que trop peu effleuré dans ce livre court (un reproche identique à celui du précédent livre de Jordi Soler que j’ai lu, Les Exilés de la Mémoire), mais l’histoire qui illustre ce propos est en définitive assez peu convaincante.
Sur ce sujet, je préfère de loin Un Métier de Seigneur, de Pierre Boulle (eh oui, le même auteur que La Planète des singes mais un tout autre registre), qui dresse le portrait d’un vrai salaud du bon côté de la barrière, lors de la Seconde Guerre Mondiale. Ce roman, que j’ai lu quand j’avais 16 ans avait été une claque (comme l’on dit familièrement) et je me souviens encore de nombreux détails aujourd’hui. C’est cette lecture-là que je préfèrerais recommander si ce thème vous intéresse…

68raton-liseur
okt 19, 2011, 2:14 pm

45. Indignez-vous ! - Stéphane Hessel
Je vous souhaite à tous, à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation. C’est précieux. (p. 12, “Le motif de la résistance, c’est l’indignation.”).
Tout, et probablement son contraire, a écrit sur ce petit opuscule. Rien de nouveau n’y est dit, et ces courtes 20 pages qui semblent rassembler des feuillets épars ne sont ni particulièrement bien écrites ni plus convaincantes que d’autres. Au fond, le principal intérêt de ce livre est son titre choc, avec son point d’exclamation qui n’est pas un ordre mais un besoin. Le mot d’indigné connaît actuellement une grande célébrité dans le monde, de l’Espagne aux Etats-Unis, je n’ose croire que c’est Hessel qui est à l’inspirateur de ce mouvement, mais il n’y a dans ce mot d’indignation (pas de révolte, encore moins de révolution) aucune idéologie, aucun système de pensée, seulement l’expression d’une humanité qui ne demande qu’à s’exprimer dans sa totalité.

69raton-liseur
Redigeret: okt 19, 2011, 2:33 pm

46. Un heureux évènement – Eliette Abécassis
Mais d’où vient cette folie que les gens ont des enfants – qu’ils décident d’avoir cette outrecuidance ? Pour qui se prennent-ils ? Est-ce qu’ils savent ce qu’ils fon, est-ce qu’ils ont conscience de tout ? Non, en fait, personne n’a rien compris. Comme le Bourgeois gentilhomme, ils font de la métaphysique et ils ne le savent pas. Ils font l’acte le plus commun et le plus inouï, qui consiste à reproduire l’humanité, en prenant en charge un petit d’homme. En étant responsables d’un autre, alors qu’ils ne le sont pas d’eux-mêmes. C’est vertigineusement banal. Ils se mettent à la place de Dieu, en toute innocence. (p. 15, Chapitre 3).
« Soudain des années d’individualisme réduites à néant. » (p. 55), c’est cela ce que raconte ce livre, les bouleversements profonds et sous-estimés qui accompagnent l’arrivée d’un premier enfant. Mais plus qu’une description de la maternité, ce livre me paraît plus traiter de l’évolution de l’amour au fil du temps, et comment une relation peut (ou ne peut pas) survivre à la trivialité (comment passer d’une relation où on n’ose éternuer devant son partenaire à une relation où il vous voit les pieds dans les étriers…).
Mais ce livre part d’une hypothèse qui me paraît erronée : on n’est pas au courant, ou alors on ne choisirait pas si facilement de faire des enfants. Je ne suis pas d’accord, je pense plutôt que l’on sait, et soit on refuse de voir, soit on est sûr que pour nous ce sera différent… Combien de personnes décideront de ne pas faire d’enfant à cause de la pseudo-vérité que prétend révéler ce livre ?
Il est de bon ton ces temps-ci de s’attaquer au mythe de la maternité, et je pense que c’est une bonne chose que de battre en brèche le discours dominant de la maternité triomphante et idyllique. Mais je ne trouve aucun livre dont le propos me satisfait réellement. J’ai lu il y a quelques mois Lait noir de Elif Shafak, et l’ai trouvé un peu simple et sans nouveauté, même constat que pour celui-ci donc. J’ai même lu le fameux et incontournable L’Amour en plus de Elisabeth Badinter il y a quelques années et avais été déçue par le côté fallacieux du raisonnement, déçue car si je suis d’accord avec sa thèse, j’aurais aimé qu’elle me donne des arguments plus convaincants pour l’illustrer. Le livre sur la maternité dans toute sa trivialité et ses doutes reste donc à écrire me semble-t-il.

70raton-liseur
okt 19, 2011, 2:47 pm

47. Une Certaine idée de l’Inde - Alberto Moravia
l’Inde est une conception de la vie (…) : celle qui veut que tout ce qui semble réel ne le soit pas, et que tout ce qui ne semble pas réel le soit. Il en résulte une dévalorisation totale de la vie perçue comme une chose absurde et douloureuse, et la conviction que l’homme ne doit pas agir pour améliorer le monde, mais s’en dégager afin de s’unir à une réalité suprasensible, c’est-à-dire spirituelle. (p. 18, Chapitre 1, “Une certaine idée de l’Inde”).
C’était en 1961. Un trio célèbre et intellectuel visitait alors l’Inde. Alberto Moravia, sa femme Elsa Morante et leur ami Paolo Pasolini. Deux d’entre eux en tirèrent un récit de voyage : Une Certaine idée de l’Inde pour Moravia et L’Odeur de l’Inde pour Pasolini. Comme l’a dit lui-même Moravia dans un entretien (reproduit en annexe de ce livre), le parti pris de ces deux livres est bien différent : « Pour ma part, cela consiste à accepter sans s’identifier ; pour Pasolini (…) il s’agissait de s’identifier sans accepter vraiment. »
C’est le livre de celui qui accepte sans s’identifier que j’ai choisi de lire. En réalité, ce livre m’est apparu plus comme une série d’articles que comme un véritable récit de voyage. Et des articles d’un intellectuel brillant, dont les phrases font mouche, j’aurais pu en citer beaucoup.
Moravia semble avoir ressenti en Inde ce choc culturel qui semble commun parmi les Européens découvrant ce pays-continent. Son livre, malgré sa brièveté, ressasse les mêmes thèmes de la religion, de la pauvreté, des castes, de la religion encore… Sa traduction en phrases d’Européen de ces réalités m’a aussi permis de mettre des mots sur ces sensations contradictoires qu’inspire ce pays qui se laisse approcher mais ne se livre pas si facilement.
En définitive, parce que ce n’est ni un récit de voyage qui emmène le lecteur sur les routes au fil des pages, ni une étude profonde de l’Inde, il me semble que ce livre s’adresse avant toute chose à ceux qui connaissent un peu l’Inde ou qui comptent s’y rendre. Une bonne façon de commencer ou de conclure une escapade indienne…

71raton-liseur
okt 19, 2011, 2:52 pm

48. Recomposition - Geneviève Grenon Van Walleghem
- Je ne comprends pas très bien.
- Tu joues aux billes ?
- Oui, je suis très fort.
- Tu l’as toujours été ?
- Non. J’ai raté plein de fois avant d’y arriver !
- Vivre heureux, c’est la même chose. Il faut essayer, échouer, recommencer, s’améliorer, si l’on veut réussir.
(p. 18-19).

Si elle revient [à la vie], elle a une chance de vivre. Si elle ne revient pas, elle aura jamais été contente, et nous nous resterons triste. (p. 31).
J’aime ces découvertes inattendues. Un livre électronique téléchargé presque par hasard*, et une lecture d’une traite de cette longue nouvelle.
Un style simple, une histoire qui se met en place petit à petit mais qui happe le lecteur dès les premières pages. Trois personnages principaux : un archéologue rêveur, un petit garçon malheureux et un vieux clochard grand fumeur devant l’éternel. Trois personnages dont les détresses se répondent et dont les histoires s’entrelacent peu à peu pour ne faire plus qu’une. Je ne peux en dire plus sans gâcher le plaisir de la découverte aux lecteurs à venir…
Une histoire du genre fantastique qui n’en est pas vraiment une, les personnages, plus que les évènements un peu étranges, étant le centre de l’histoire. Une histoire de solitude et d’amour, une histoire pleine d’une discrète humanité.

* Ce livre est disponible gratuitement sur le site e-books libres et gratuits. Outre les classiques libres de droit, il semble que ce site mette aussi à disposition des lecteurs quelques œuvres contemporaines.

72raton-liseur
okt 19, 2011, 2:56 pm

49. La mort d’Olivier Bécaille et autres pièces – Emile Zola
Quatre nouvelles qui ne dépareillent pas dans l’œuvre de Zola, sauf peut-être la première (qui donne son nom à ce livre), au ton fantastique qui ne ressemble pas au chef de file du naturalisme. C’est toujours le même style, les mêmes préoccupations, mais avec une fin en générale heureuse, ou tout au moins ironique, ce à quoi Zola ne nous a pas habitué. Il est intéressant de voir que Zola maitrise aussi la forme ramassée de la nouvelle, un art de la concision que je ne lui aurais pas prêté de premier abord.
Une bonne façon de lire une petite dose de classique, et de me rappeler que, décidément, il est temps que je me replonge dans ma lecture des Rougon-Macquart !

73raton-liseur
okt 19, 2011, 3:08 pm

Et voilà, enfin, mon retard accumulé depuis quelques mois est rattrapé. La mort d’Olivier Bécaille est le dernier livre que j’ai fini, le week-end dernier. Je suis repartie de ce pas dans le Nord de l’Europe, au siècle dernier, pour la suite de la saga de Dina, par Herbjørg Wassmo.
Il est amusant de me dire que lorsque j’ai commencé à prendre du retard sur cette liste de lecture, j’étais en train de mettre mes livres dans des cartons et que, si tout se passe comme prévu, je vais enfin pouvoir les sortir de ces mêmes cartons la semaine prochaine ! Il est temps que je retrouve ma bibliothèque (en tout cas une partie, le reste étant toujours de l’autre côté de l’Atlantique) et que je puisse enfin être à nouveau entourée de tous ces livres que je sais que j’ai quelque part mais qui sont hors d’atteinte...

74raton-liseur
Redigeret: nov 21, 2011, 7:40 pm

50. Fils de la Providence - Herbjørg Wassmo
Tome 1/2 - Fils de la Providence 1
Tome 2/2 - Fils de la Providence 2
La vie ne valait rien. On avait passé notre examen. Restaient la guerre, le vide et les femmes. Pouvait-on vivre ou mourir pour ça ? (p. 83, Chapitre 6, Troisième livre, Tome 2).
Comme une fourmi dans la bruyère, ce second volet d’un triptyque, que j’ai commencé en juin dernier avec Le livre de Dina (cf. critique dans le message 42), reprend à l’endroit même où l’on avait les personnages, et l’on est immédiatement replongé dans l’atmosphère battue par les vents et pourtant étouffante de la propriété de Reinsnes, sur les lointaines côtes nord de la Norvège. Si la première partie est centrée sur le personnage de Dina, et si l’on peut dire que c’est le livre de la culpabilité et de la liberté, cette seconde partie suit Benjamin, le fils de Dina, et il est cette fois question de la responsabilité et de la lâcheté.
Benjamin, adolescent puis jeune homme, tente d’apprivoiser l’image d’une mère à la personnalité forte et au parcours peu banal et se débat, empêtré dans les difficiles souvenirs de son enfance. Il tente d’apprendre qui il est et va d’échecs cuisants en douloureuses leçons. Oscillant constamment entre velléités de courage et lâchetés impardonnables, c’est avant tout parce qu’il ne peut vivre avec lui-même qu’il accumule les expériences douloureuses et qu’il rend malheureux tous ceux dont il s’approche.
Difficile apprentissage. Est-il plus un homme à la fin des 500 pages de ces deux volumes ? Rien ne lui aura été épargné et rien n’aura été épargné au lecteur (je n’ai jamais lu une telle description, souvent crue, de l’adolescence masculine, y compris l’apprentissage de la sexualité). Mais seul le prochain tome de cette saga, L’héritage de Karna, pourra le dire. Il me faudra un peu de temps pour me lancer dans cette lecture, la plongée dans la vie torturée de Benjamin Grønelv m’a trop secouée et mis mal à l’aise, j’ai besoin d’un répit avant de reprendre cette saga et de suivre une nouvelle génération se débattant avec la vie.

75raton-liseur
Redigeret: okt 31, 2011, 12:58 pm

51. Le Crayon du charpentier - Manuel Rivas
Il avait du charme, je te l’ai déjà dit. Pour les femmes, il avait autant de charme qu’un joueur de cornemuse. (p. 198, Chapitre 18).
Un livre tout simple, qui parle d’une belle histoire d’amour toute simple, dont témoigne l’amoureux éconduit au crépuscule de sa vie terne mais pas amère. Il se trouve que cela se passe à la fin de la guerre d’Espagne, que l’amoureux chanceux est du côté glorieux des vaincus vertueux tandis que l’amoureux éconduit est du côté des vainqueurs tourmentés. L’un est prisonnier politique, l’autre est gardien de prison.
Cela aurait pu déboucher sur un livre sombre, lourd dénonçant les exactions franquistes, mais il n’en est rien. C’est une gentille histoire tout en nuance, légère et lumineuse, éclairée par la personnalité du docteur Da Barca, optimiste parce que les autres ne réussissent plus à l’être. Est-ce un livre sur la guerre, sur l’héroïsme et la lâcheté, je ne le crois pas, bien que ce soient des thèmes chers à l’auteur. Je ne sais pas très bien de quoi traite ce livre, de son ton léger et sans y toucher. Une lecture aussi légère que l’écriture, qui coule doucement mais ne me laissera probablement pas beaucoup de souvenir.

Note : La citation en exergue de cette critique est avant tout un clin d’œil pour rappeler que ce livre est écrit en galicien. Toute l’œuvre de Manuel Rivas est à la gloire de cette région d’Espagne et dans ses livres liés à la guerre d’Espagne, notamment L’Eclat dans l’Abîme (dont le titre original me plait bien plus : Os libros arden mal, littéralement « Les Livres brûlent mal »), les héros ne sont pas que républicains, communistes ou anarchistes, ils sont aussi souvent indépendantistes ou autonomistes. Je me demande si ce n’est pas ce second aspect, leur attachement à leur culture, qui prime dans la tendresse dont Manuel Rivas fait preuve envers ses héros.

76raton-liseur
okt 31, 2011, 1:21 pm

52. Désolations - David Vann
Rhoda représentait la sécurité et elle était disponible. Il achèterait une bague et ils auraient peut-être des enfants, et tout cela lui donna une envie pressante de braquer le volant pour se précipiter dans le fossé. (p. 167, Chapitre 21).
Un livre froid, froid à l’extérieur, froid à l’intérieur, j’ai eu froid de façon physique pendant toute ma lecture. David Vann l’avait dit lors de la parution de son précédent roman, Sukkwan Island, il n’avait pas fait le tour de la question. Et encore une fois, il est question de vie ratée, d’espérances déçues et de pensées suicidaires, cela dans les mêmes paysages que le précédent roman.
Les thèmes sont les mêmes donc, les ressorts dramatiques sont similaires, en particulier l’environnement et la façon dont les conditions climatiques extrêmes poussent les véritables sentiments à se révéler. Mais ce n’est pas le même livre. Celui-ci me paraît beaucoup plus dur, car il n’est pas question d’un homme, d’un cas isolé, mais d’un couple, d’une famille, d’une vie banale, trop banale, à laquelle beaucoup d’entre nous peuvent s’identifier. Il est question de la difficulté à accepter une vie médiocre lorsque l’on espérait plus.
Si ce livre n’est pas aussi réussi que le précédent, s’il y a quelques maladresses et des passages qui semblent manquer de travail (ce ne semble pas être la traduction puisque les deux traductions sont l’œuvre de la même personne), il fait tout de même assez froid dans le dos pour que l’on veuille être plus intransigeant avec nos choix de vie, afin de ne pas éprouver à l’heure des bilans ces regrets qui battent aux tempes comme une migraine persistante.

77raton-liseur
nov 7, 2011, 7:08 pm

53. Le faucon des mers - Rafael Sabatini
Rien de tel qu’un bon roman d’aventures, si possible de pirates pour passer un moment de lecture agréable et simple. Et le Faucon des mers est bien le roman qu’il me fallait pour faire une pause et respirer après quelques bouquins intéressants mais pesants et difficiles à digérer.
La quatrième de couverture de Phébus, probablement l’édition que je préfère lorsqu’il s’agit de récits de voyages et de romans avec du vent salé entre les pages, parle d’un auteur qui renouvelle le genre du roman d’aventure. Je ne suis pas une spécialiste de ces romans (seulement une lectrice qui aime beaucoup ce genre…), mais je ne suis pas certaine de voir en quoi ce roman renouvelle le genre. Peut-être parce qu’il se passe en Méditerranée, qui n’est pas le terrain de jeu avec lequel je suis la plus familière, mais cela montre plus mon ignorance que cela ne renouvelle le genre… Peut-être parce qu’il est question d’un « choc des civilisations » avant l’heure (il est assez amusant de lire ce roman du début du XXème siècle à l’aune des débats idéologiques actuels…), traité avec un brin de racisme (ou d’incompréhension) tout de même, mais ce n’est pas non plus le premier livre à s’aventurer dans les terres de la Barbarie (sic).
Non, c’est un livre qui m’a paru très classique dans sa facture, avec d’ailleurs l’utilisation peut-être un peu trop récurrente de la même « ficelle », celle des apparences trompeuses. Mais cette facture classique ne m’a pas du tout dérangée, c’est un bon roman d’aventure qu’on ne peut pas lâcher, qui va de rebondissements en trahisons et de revirements en ruses incroyables. Une lecture divertissante, réjouissante même, dont je suis ressortie les cheveux emmêlés de vent et les yeux éblouis de soleil !

78raton-liseur
Redigeret: nov 10, 2011, 1:30 pm

54. The Help (La Couleur des sentiments) - Kathryn Stockett
Jackson, dans le Mississippi, au début des années 60. On est à la veille de grands changements aux Etats-Unis. Kennedy est au pouvoir, Martin Luther King fait son plus célèbre discours. Des activistes sont lynchés, des gens qui n’en peuvent plus de subir se joignent à des marches ou des sit in pacifistes.
C’est dans ce contexte tendu que l’on suit une demi-douzaine de femmes, entre quotidien immuable et société en mutation. Certaines sont femmes au foyer, aisées et sûres de leur bon droit ; les autres sont leurs aides à domiciles, leurs bonnes, réservées, soumises, silencieuses. Les premières sont blanches, les secondes sont noires. C’est la ségrégation vue par le petit bout de la lorgnette, dans ce qu’il a de plus quotidien et de plus paradoxal. Les aides domestiques noires ont la responsabilité d’élever des enfants blancs, mais n’ont le droit d’utiliser ni les mêmes couverts ni les mêmes toilettes que leurs employeurs… C’est le racisme au quotidien, comme un mode de vie, comme une évidence que l’on ne songe pas à questionner, ni d’un côté ni vraiment de l’autre.

Le livre est très simple, sans véritable intrigue ni rebondissement qui ne soit prévisible. Avec quelques scènes un peu trop idylliques, des personnages un peu trop facilement caricaturaux (l’adaptation au cinéma n’a pas dû être difficile), ses 500 pages souffrent de quelques longueurs et je m’étonne presque qu’un tel livre ait eu un tel succès de librairie. Mais je dois le dire, j’ai moi-même dévoré ce livre, en à peine trois jours malgré une écriture qui retranscrit le parler du sud, un anglais auquel je ne suis pas habituée et qui a ralenti mon rythme de lecture.
Comme le roman dans le roman, le livre s’articule autour du témoignage de trois femmes, qui nous racontent les évènements, d’abord anodins puis ceux qui secouent ce petit microcosme bien-pensant qui vit comme si rien n’avait changé depuis l’esclavage heureux de Autant en emporte le vent. On rencontre ces femmes au bord de la rive et on les quitte au milieu du gué, nous laissant imaginer quelle pourrait être la suite des évènements.
Un livre intéressant où j’ai découvert un visage de la ségrégation aux Etats-Unis, quelque chose dont j’avais entendu parler, certes, mais dont je n’avais probablement pas pris conscience de l’ampleur. Dans mon idée, c’est comme si la Guerre de Sécession avait réglé tout cela, et je réalise enfin qu’il en était toujours de même il y a tout juste 50 ans, dans un pays qui encense les libertés. Cela m’a permis de revoir certaines de mes perceptions sur ce pays. Le livre faisant allusion à des évènements historiques précis, il peut d’ailleurs être utile de se référer à quelques documents sur la lutte des Noirs pour les Droits Civiques, notamment à Jackson*.
Lecture très utile, donc et je suis contente qu’il ait un tel succès. Un livre que je recommande pour sa valeur éducative, un peu moins pour ses qualités littéraires.

* Les liens sont vers le Wikipédia en anglais car la version française semble bien peu étoffée sur ces évènements.

79raton-liseur
Redigeret: nov 14, 2011, 10:34 am

55. The Whale Rider (Le chevaucheur de baleine*) - Witi Ihimaera
‘Oh, Paka, and the whales are still singing,’ she said.
Haumi e, hui e,
taiki e.
Let it be done.
(p. 122, Chapitre 21, Epilogue, “The Girl from the Sea”).**
Ce petit village de la côte est de la Nouvelle Zélande est habité par une communauté de Maori, descendants de l’ancêtre mythique Kahutia Te Rangi, le chevaucheur de baleine, une communauté en quête d’une identité collective qui n’est pas folklore.
Et au grand désespoir du chef Koro Apirana, son premier arrière-petit-enfant est une fille, Kahu. La ligne de succession se brise là, irrémédiablement. Mais c’est sans compter sur le patriarche des baleines, qui se laisse envahir par la nostalgie des jours anciens et revient sur les lieux de son bonheur passé. La petite Kahu sera l’instrument de la réconciliation, à la fois bravant et sauvegardant les traditions et l’unité du monde qui est celui des siens.

The Whale Rider est de ces livres qui peuvent se lire à tout âge car il est une belle histoire pour un enfant qui sait encore que tout est possible et il est une jolie fable sur l’identité et la transformation pour un adulte. L’écriture est simple et poétique, le livre va à l’essentiel, même si la première moitié ne prépare pas à la seconde partie. Et le parallèle qui se dessine peu à peu entre le vieux chef Maori et le vieux patriarche des baleines est émouvant et une très belle métaphore.
Sans être moraliste ni simpliste, ce livre fait réfléchir sur l’identité culturelle, montre que l’évolution des traditions et la perpétuation des valeurs d’une société ne sont pas antinomiques. Un très beau livre qui n’a hélas pas encore été traduit en français, mais dont on peut entrevoir la philosophie dans le merveilleux film qu’en a tiré Niki Caro. Je recommande chaudement le film pour ses superbes images et l’histoire d’un grand-père et de sa petite-fille et le livre pour le chant de ses phrases et la sérénité qu’il dégage.

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

** Tentative de traduction personnelle :
« Oh, Paka, et les baleines continuent de chanter », dit-elle.
Haumi e, hui e, taiki e.
Qu’il en soit ainsi.

80raton-liseur
Redigeret: nov 14, 2011, 12:03 pm

C’est donc avec The Whale Rider que je "fête" aujourd'hui la mise en ligne de ma centième critique. C’est un hasard, mais il me semble que c’est un livre assez représentatif de mes lectures en général, puisqu’il y est question de mer, d’horizons lointains, de quête d’identité et qu’il pourrait s’agir d’un livre pour enfants, genre que j’affectionne particulièrement…
Drôle d’habitude que j’ai prise depuis que j’ai rejoint BiblioChose que de faire l’énumération de mes lectures et de les mettre en ligne, telles des bouteilles dans la mer du cyber-espace. Je ne sais à quel point ces critiques peuvent intéresser les autres, mais je me suis rendue compte qu’elles influent sur mes lectures. Comme si je lisais de façon plus consciente (en prenant des notes mentales, « tiens, ça il faudra que je le signale ») et surtout je m’aperçois que je me souviens beaucoup mieux de mes lectures, que les livres que j’ai aimés m’accompagnent plus longtemps, et j’aime cette compagnie...
L’exercice d’écriture de critiques, d’abord vu comme ma contribution au site, est donc aussi devenu au fil des lignes un exercice égoïste, qui nourrit et enrichit ma lecture…

81raton-liseur
Redigeret: nov 18, 2011, 10:51 am

56. Travailler moins pour lire plus - Alain Serres (Texte) & Pef (Illustrations)
Un de ces petits livres gentiment subversifs qui fleurissent aimablement ces derniers temps. Comme si la tradition du pamphlet se trouvait tout à coup revigorée. Hélas, un peu comme le désormais célèbre Indignez-vous ! de Stéphane Hessel, il est dommage que ce livre donne l’impression d’avoir été écrit sur un coin de table, avec de nombreuses approximations ou phrases qui me semblent bancales. Bonne littérature, même courte, et mouches du coche ne sont-elles pas compatibles ? Je continue à espérer que si. Alors, finalement, je ne retiendrai ce livre que pour son titre accrocheur qui fait rêver et pour la bonne idée de cette île gouvernée par un roi Dontontairalenom et chamboulée par une révolution pacifique et livresque !

82raton-liseur
nov 21, 2011, 7:16 pm

57. Entre ciel et terre - Jón Kalman Stefánsson
Nos paroles sont des brigades de sauveteurs désemparées, équipées de cartes de géographie inutilisables et du chant des oiseaux en guise de boussole (p. 112, Chapitre 3, “L’enfer, c’est ne pas savoir si nous sommes vivants ou morts”).
Un beau livre âpre et plein de poésie. Même au XIXème siècle, même dans un petit village de la côte islandaise, même des pêcheurs qui travaillent dans des conditions très dures peuvent aspirer à la culture, à la lecture et, surtout, peuvent se poser des questions existentielles. Quel est le sens de la vie, s’il en est un ? Faut-il même vivre, ou mieux vaut-il mettre fin à toute cette absurdité ? Absurdité, j’ose le mot, car ce livre a comme un goût d’Albert Camus en plus froid, plus humide et plus salé. C’est l’absurdité traitée de façon plus poétique, mais aussi par petites touches qui créent une vision impressionniste de la difficulté à vivre, plus qu’elles n’apportent de l’eau au moulin de ma réflexion.
Ce livre promettait beaucoup, j’en attendais peut-être trop et je ne peux donc m’empêcher d’être un peu déçue. Déçue de voir que l’auteur a soigneusement évité les moments où la narration aurait pu devenir difficile, comme la mort de Bárður, dont seul l’avant et l’après sont évoqués. Déçue d’avoir trouvé que la seconde partie, trop éparpillée, n’était pas à la hauteur de la première.
Ce livre me laissera donc une impression mitigée, d’un auteur trop poétique et allusif pour moi, mais c’est un style qui peut plaire à d’autres lecteurs qui ont peut-être une plus grande sensibilité que moi. Je veux tout de même signaler cette première page, qui ouvre le livre et en donne le ton : « Nous sommes presque uniquement constitués de ténèbres ». Il se trouve que c’est tout simplement le titre du premier chapitre, mais voir cette phrase se détacher, seule, sur la première page, m’a mise en arrêt et m’a fait plonger immédiatement dans le livre. Dommage que mon attention ne se soit pas maintenue ainsi tout du long.

83raton-liseur
Redigeret: nov 29, 2011, 7:24 pm

58. Frida Kahlo - Autoportrait d’une femme - Rauda Jamis
La peinture a rempli ma vie. J’ai perdu trois enfants et une autre série de choses qui auraient pu remplir mon horrible vie. Tout cela a été remplacé par la peinture. Je crois qu’il n’y a rien de mieux que le travail. (p. 306, Frida Kahlo, citée en exergue du chapitre 47, “L’Attachement”).
J’espère que la sortie sera joyeuse et j’espère ne jamais revenir. (p. 394, Frida Kahlo parlant de sa mort, citée au chapitre 59, “Le Dernier mot”).
Il est dit que Frida Kahlo est le peintre mexicain le plus connu internationalement. J’avoue mon ignorance, j’ai découvert ce peintre par des reproductions dans mes livres d’espagnol au lycée, mais n’ai vu ses œuvres qu’en venant sur ses terres, au Mexique. Je ne suis pas certaine de pouvoir dire que j’aime cette artiste, mais sa peinture m’intrigue. La majeure partie de son œuvre est faite d’autoportraits (55 sur les 143 tableaux qu’elle a peints, si j’ai bonne mémoire), et beaucoup de ses tableaux suscitent une sensation d’oppression, de mal-être.
Intriguée pour intriguée, et puisque dimanche dernier je visitais à nouveau la Casa Azul (la « Maison Bleue », maison de famille de Frida Kahlo, aujourd’hui transformé en musée), je me suis enfin décidée à plonger dans ce livre, qui était dans mes intentions de lecture depuis avant de venir m’installer à Mexico il y a quelques mois.

Le livre de Rauda Jamis est, calme-t-on de partout, le premier livre écrit sur Frida Kahlo en français et semble avoir fait beaucoup pour la notoriété de cette artiste en France, lorsqu’il est paru en 1985. Bien que ce soit a priori un livre de référence, je dois avouer que sa lecture m’a déçue, et ce à plusieurs titres. D’abord, j’espérais mieux comprendre la peinture de Frida Kahlo, alors qu’il est surtout question que de sa vie et bien peu d’analyse de son œuvre, de la formation de son style ou de son univers artistique. Les seuls tableaux qui sont mentionnés sont ceux qui sont les plus faciles à interpréter, ceux sur son accident et ses fausses couches en particulier, alors que les autoportraits (qui sont les tableaux qui m’intriguent le plus) sont presque passés sous silence. De même, certains points qui me semblent critiques dans la vie de Frida Kahlo ne sont pas ceux sur lequel l’auteur s’attarde (la nature ambigüe et complexe de sa relation avec Diego Rivera - il est seulement dit qu’elle est ambigüe et complexe…), voire ils sont à peine évoqués (ses nombreuses relations extraconjugales, hétérosexuelles comme homosexuelles, par exemple, non que la vie intime des artistes m’intéresse particulièrement, mais la peinture de Frida Kahlo est tellement personnelle que cela me paraît important).
Si le fond n’était pas celui que j’espérais, la forme ne m’a pas non plus aidée à apprécier ma lecture. L’alternance de chapitres où la biographe parle et de ceux où Frida est sensée parler directement, plus redondants que complémentaires, ralentit la lecture et, en l’absence d’une note expliquant la démarche de l’auteur et possiblement la source différenciée de ces deux voix, il est difficile de faire la part entre ce qui est avéré et ce qui est une construction de la part de l’auteur.
En définitive, un livre qui n’est pas fait pour moi. Peut-être, malgré mes connaissances artistiques limitées, en savais-je trop sur ce personnage pour que le livre m’apporte quelque chose. Il est probablement une bonne introduction à l’artiste, mais n’apporte pas de réponses aux questions que l’œuvre de Frida Kahlo me pose. A moins que je ne me leurre et que ses tableaux demeurent une irréductible énigme ?

84raton-liseur
dec 12, 2011, 3:19 pm

59. La Vie sur le Mississippi - Tome 1/2 - Mark Twain
Qui n’a jamais rêvé d’être pilote sur un vapeur sur le Mississippi ? Moi, non plus, je dois l’avouer… Et pourtant, je me suis laissée embrigadée dans ce livre comme si ç’avait été un rêve de gosse…
Mark Twain rend sa fascination pour le fleuve communicative et l’on se laisse entraîner, lisant des considérations techniques sur le fleuve, son cours changeant et le métier de pilote comme s’il s’agissait d’un roman à suspens ! La façon dont Mark Twain (nom de plume de Samuel Clemens, qui est le cri des sondeurs du fleuve indiquant la marque des deux brasses de fond) s’amuse de lui-même lors de ses années de découverte et d’apprentissage du métier rend le ton léger et moqueur, contrebalançant les envolées techniques qui demeurent d’ailleurs tout à fait abordables.
Un livre amusant donc, traitant d’un sujet sur lequel je ne m’attendais pas à lire avec tant de gourmandise ! Le livre finit cependant de façon abrupte et j’ai donc commencé immédiatement le second tome, et là c’est une autre histoire…

85raton-liseur
Redigeret: dec 13, 2011, 3:24 pm

60. La Vie sur le Mississippi - Tome 2/2 - Mark Twain
Le premier tome se finissant de façon abrupte, je m’attendais à reprendre le fil du récit où je l’avais laissé, mais il n’en est rien, cette seconde (et dernière) partie du récit prend une autre direction et conte le retour de Mark Twain, vingt-et-un ans plus tard, sur le fleuve Mississippi et sur les lieux de son apprentissage du métier de pilote. Nostalgie d’une des plus belles périodes de sa vie à l’en croire, nostalgie d’une période révolue, rejetée dans l’histoire par le développement du chemin de fer.
Mais, là où le ton moqueur de Mark Twain faisait mouche dans le premier tome, il alourdit ici le texte et devient prétentieux et ennuyeux (une remarque que je m’étais déjà faite d’ailleurs lors de ma lecture des aventures de Huckleberry Finn il y a de cela plusieurs années).
En définitive, je n’ai pas même lu cinquante pages de ce livre, rebutée par le style et perdant l’intérêt de la découverte que revêtait le premier tome. Dommage de finir sur cette note négative un voyage fluvial qui avait si bien commencé…

86raton-liseur
dec 12, 2011, 4:12 pm

61. Calvin and Hobbes - It’s a magical world (Le monde est merveilleux*) - Bill Watterson
Calvin: I read this library book you got me.
Mom: What did you think of it?
Calvin: It really made me see things differently. It’s given me a lot to think about.
Mom: I’m glad you enjoyed it.
Calvin: It’s complicating my life. Don’t get me any more.
**
Le dernier recueil des facéties de Calvin, avec bien sûr la caution bienveillante de Hobbes. Un bon cru, qui montre que Bill Watterson n’avait pas fini d’être inventif et qu’il n’y a pas assez d’une enfance, ni même des dix ans qu’a duré la série pour épuiser toutes les bêtises que l’on peut faire. Calvin et Hobbes tirent leur révérence et c’est avec un brin de nostalgie que l’on referme ce dernier volume, qui finit par les mots du titre, "It’s a magical world", « Le monde est merveilleux. »

* Je pense que ce livre est traduit en français en deux opus, Y a des jours comme ça ! et Cette fois, c’est fini !. Je propose ici une traduction littérale du titre original, qui est aussi la dernière phrase de Calvin avant de tirer sa révérence…

** Tentative de traduction personnelle :
« Calvin : J’ai lu le livre que tu m’as emprunté à la bibliothèque.
Maman : Et qu’est-ce que tu en as pensé ?
Calvin : Ça m’a vraiment fait voir les choses sous un autre angle. Ça m’a beaucoup fait réfléchir.
Maman : Je suis contente que ça t’ait plu.
Calvin : Depuis, ma vie est compliquée. Ne me ramène plus jamais de livre. »

87raton-liseur
dec 14, 2011, 7:03 pm

62. Corto Maltese - Les Celtiques - Hugo Pratt
Obéron : Adieu, Puck… L’heure est venue pour moi aussi de retourner dans la bibliothèque parmi les pages poussiéreuses des livres anciens… Dans la ballade oubliée du bon Huon de Bordeaux. Adieu jusqu’au jour où notre chère Celtique aura encore besoin de nous. (p. 95, Partie IV, “Songe d’un matin d’hiver”).
Les Celtiques, un de ces albums de Hugo Pratt qui se lit, se relit et offre toujours quelque chose de nouveau. Onirique, énigmatique, on y découvre toujours un autre angle, un autre sous-entendu, une autre interprétation…
La forme de la nouvelle en BD semble être celle qui convient le mieux à Hugo Pratt. Ce recueil en contient six, chacune de 20 pages, pas plus. Assez pour évoquer des instants, développer des petits drames, tout en laissant une grande part de mystère et de non-dit.
Ces histoires au fort goût de sel et de rêve, ouvertement antimilitaristes, forment l’un de mes livres préférés de Carto Maltese, et je ne boude pas mon plaisir, encore et encore !

88raton-liseur
jan 4, 2012, 6:19 pm

Il me faut encore écrire et mettre en ligne quelques « critiques » avant de pouvoir clore ma liste de lecture pour l’année 2011, mais j’ai déjà créé le nouveau chapitre pour l’année qui vient de commencer, que vous pouvez trouver sous le nom trivial de Raton-Liseur - Lectures de 2012.

89raton-liseur
jan 8, 2012, 1:44 pm

63. Nous, les noyés - Carsten Jensen
Je compris soudain mon papa tru. Il arrive un moment dans la vie d’un marin, pensai-je, où il ne se sent plus chez lui sur terre, alors il s’abandonne au Pacifique, là où aucun pays ne vient boucher la vue, où le ciel et l’océan se reflètent jusqu'à ce que haut et bas perdent leur signification, où la Voie lactée ressemble à l’écume d’une vague qui se brise quand le globe terrestre tangue et roule comme un navire au milieu des brisants du ciel étoilé, et où le soleil lui-même n’est plus qu’un petit point incandescent de phosphorescence sur l’océan de la nuit. (p. 148-149, Chapitre 4, “Le Voyage”, Partie I).
Albert songea aux paroles que le garçon avait dites à la tête réduite. Knud Erik avait tiré sa propre morale à partir des miettes de ce qu’Albert lui avait raconté. C’était aussi une sorte de sagesse, voire peut-être la plus fondamentale. « Tu as fini par mourir, mais tu t’es d’abord bien battu. » S’il s’y tenait, les choses ne tourneraient pas trop mal pour lui. La vie pourrait toujours, au fur et à mesure, ajouter ses propres nuances. (p. 345, Chapitre 3, “Le Garçon”, Partie II).
Je ne sais où commencer. Non que ce livre me laisse indifférente, loin de là, mais il semble tant se suffire à lui-même, dire tout ce qu’il y a à dire que je ne sais comment aborder cette critique. Ce livre est comme ce beau deux-mâts des jours lointains de la marine à voile encerclé par un tourbillon marin, sur la couverture du livre.
L’histoire, centrée autour du village côtier de Marstal au Danemark, s’étend sur près d’un siècle, de l’essor de la marine à voile au long cours à sa disparition, de 1848 à 1945, d’une guerre (contre la Prusse) à l’autre (la Seconde Guerre Mondiale, bien sûr), comme un effet de miroir. Ce livre est tout, de ces livres qui ont pris dix ans de la vie de leur auteur comme il me semble l’avoir lu quelque part. Une chronique historique des grandes heures de la marine à voile, la vie de personnages complexes, une réflexion sur la société, une recherche littéraire avec une narration polyphonique (dont notamment une narration à la première personne du pluriel, emploi déroutant mais très bien maîtrisé du « nous »)…
Je me suis attachée aux personnages principaux, Albert Madsen puis Knut Erik, mais c’est surtout la description de la fascination pour la mer que je retiendrai de ce livre. Je crois bien que je n’ai jamais vu une description qui me paraît aussi juste, qui rend compte à la fois de la fascination et de la répulsion pour la mer et pour la vie en mer. « À peine les marins étaient-ils revenus, le corps meurtri par leurs éternelles luttes contre la mer, qu’ils en redemandaient et repartaient sur le pied de guerre, jamais rassasiés de ces coups de fouet qui pleuvaient de tous côtés, de la tempête, des vagues, du froid, de la mauvaise nourriture, de l’hygiène épouvantable, de la grossièreté de leur langage entre eux, de la violence qui s’abattait, comme par hasard, sur les plus faibles. » (p. 503, Chapitre 3, “Le Marin”, Partie III). Cette ambivalence est très bien rendue tout au long du livre, par des phrases belles qui font mouche. Un grand coup de chapeau au traducteur, d’ailleurs, car les phrases coulent, les images sont parlantes, et l’on sent que le traducteur a fait un véritable travail sur la langue pour rendre en français, sans lourdeur, le style poétique original.
C’est un livre comme j’en ai rarement lu, peut-être un des plus beaux livres sur la condition de marin, sur son ambiguïté, entre fascination et résignation, fatalisme et désir, peur et courage. Il peut, je pense, intéresser des lecteurs qui n’ont pas d’attirance particulière pour la mer, car la vie sur un bateau est un miroir qui amplifie les travers de la vie à terre, mais comme ce sont surtout les descriptions maritimes que j’ai aimé dans ce livre, je le conseillerais avant tout à ceux qui ont déjà mis les pieds sur un bateau, ou qui ont le rêve insistant et inexplicable de le faire un jour.

90Louve_de_mer
jan 8, 2012, 1:53 pm

Grâce à toi j'ai trouvé le cadeau d'anniversaire que je vais offrir à mon mari, un ancien marin.

91raton-liseur
Redigeret: jan 8, 2012, 2:10 pm

Le livre peut paraître cher, 29 euros en France (éditions Libella / Maren Sell), mais l’épaisseur, la qualité du papier et surtout le travail d’écriture et de traduction justifie certainement ce prix pour ceux qui peuvent ne pas attendre l’édition de poche. C’est une lecture que je recommande chaudement. Une longue et belle lecture iodée !

92raton-liseur
jan 9, 2012, 10:23 am

64. Cuánta tierra necesita un hombre (Combien de terre pour satisfaire un homme*) - Léon Tolstoï (Texte original) & Miguel Angel Diez (Adaptation et Illustrations)
Ce « roman graphique », comme l’on dit, m’a permis de découvrir un côté de Tolstoï que je ne connaissais pas, celui du nouvelliste, voire du moraliste. Cette nouvelle, écrite en 1886 et considérée par James Joyce comme la meilleure nouvelle jamais écrite, semble avoir connu de nombreuses adaptations dans les pays hispanophones, alors que je n’en ai pas trouvé trace en français.
Adaptée ici par Miguel Angel Diez, illustrée avec des dessins simples et filiformes qui déroutent d’abord mais qui en définitive font ressortir l’essentiel, cette nouvelle, qui prend peut-être une plus grande signification sur le continent des réformes agraires, pose simplement la question de ce qu’il faut posséder pour être un homme et, peut-être encore plus, pour être un homme heureux.
Entre fables tirées d’autres nouvelles de Tolstoï et contées par ce qui pourrait être la bonne conscience du paysan Pajom et les matriochkas du diable, cette bande dessinée à l’enseignement simple est un bon moment de lecture qui, entre réalisme et surnaturel, décrit dans le monde d’hier ce qu’est la cupidité qui ronge encore et toujours le monde d’aujourd’hui.

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

93raton-liseur
jan 9, 2012, 10:25 am

65. Fables amères - De tous petits riens - Chabouté
Encore une fois, le trait de Chabouté, ses plans qui en disent long et sa monochromie tout en nuance font mouche dans ce recueil de « petits riens » bien amers.
Chabouté est le seul auteur de bande dessinée qui puisse me nouer la gorge ainsi. Chacune de ses petites histoires, même si certaines utilisent des clichés éculés, frappent toujours juste, montrant l’absurde de notre société qui manque cruellement de chaleur et d’attention. Si ce livre est triste, il montre aussi qu’il suffirait parfois de pas grand-chose. Un sourire, un ton aimable. Ça ne résoudra pas la misère, mais cela mettra un rayon de soleil dans certaines vies. A lire et à relire, à petite dose, pour se souvenir de ce que l’on pourrait être.

94Louve_de_mer
Redigeret: jan 9, 2012, 11:17 am

On dirait bien que la nouvelle de Tolstoï a été publiée en français chez Flammarion, j'ai trouvé ceci.

95raton-liseur
jan 10, 2012, 9:36 am

#94 - Effectivement, et elle se trouve probablement dans certains recueils de nouvelles aussi. Cependant, j’ai vraiment été surprise de voir qu’elle a donné lieu à au moins deux publications (ce « roman graphique » ainsi qu’une traduction) récentes en espagnol et rien d’équivalent en français. C’est peut-être un simple hasard éditorial, mais je trouve que la différence de regard que nous portons sur la littérature mondiale selon nos origines géographiques ou culturelles est quelque chose d’assez étrange. Ouverture sur des œuvres venues d’ailleurs, mais ouverture selon notre propre sensibilité culturelle ?

96raton-liseur
jan 10, 2012, 9:56 am

Je profite d’ailleurs de cette digression pour signaler que le groupe Reading Globally (discussions en anglais) s’est choisi un thème annuel pour 2012, « Classics in their own countries » (littéralement « Classiques dans leur pays d’origine).
Il y a une liste de discussion pour les recommandations : Classics in Their Own Country: Ideas for the Year-Long 2012 Theme Read, ainsi que des discussions par région du globe, qui commencent elles aussi par un certain nombre de recommandations :
- Afrique et Moyen-Orient : 2012: Classics in their own country--Africa and Middle East
- Asie et Océanie : 2012: Classics in their own country: Asia and Oceania
- Amérique Latine et Caraïbes : 2012: Classics in their own country--Latin America and Caribbean
- Europe et Turquie : 2012: Classics in their own country--Europe and Turkey

Les discussions et les idées de lectures risquent d’être nombreuses et intéressantes, de même que le regard porté par d’autres sur notre littérature nationale. Les recommandations pour la France (incluses dans ce message) m’ont d’ailleurs amusées. Au risque de révéler au grand jour la superficialité de mes connaissances littéraires, vous considéreriez Henri Barbusse comme un auteur français classique, vous ? Et Camus est recommandé pour l’Algérie, point de vue intéressant !

97raton-liseur
jan 10, 2012, 12:42 pm

66. El Extranjero (L’Etranger) - Albert Camus (Texte) ; Juan Carlos Kreimer (Adaptation) & Julián Aron (Illustrations)
On aura cependant une idée plus exacte du personnage, plus conforme en tout cas aux intentions de son auteur, si l'on se demande en quoi Meursault ne joue pas le jeu. La réponse est simple, il refuse de mentir. Mentir, ce n'est pas seulement dire ce qui n'est pas. C'est aussi, c'est surtout dire plus que ce qui est et, en ce qui concerne le cœur humain, dire plus qu'on ne sent. C'est ce que nous faisons tous, tous les jours, pour simplifier la vie. Meursault, contrairement aux apparences, ne veut pas simplifier la vie. Il dit ce qu'il est, il refuse de masquer ses sentiments et aussitôt la société se sent menacée. (Préface d’Albert Camus à l’édition américaine, 1955).
Une adaptation du premier (d’un point de vue chronologique) grand roman de Camus. On y sent ce soleil qui fera dire à Mersault cette phrase presque incompréhensible « [J’ai tué] à cause du soleil ».
Je ne sais pourquoi, je qualifierais le dessin d’« américain », ce noir et blanc aux traits nets et carrés. Ce n’est pas le graphisme que je préfère dans les bandes dessinées, mais il semble répandu en Amérique Latine si j’en juge par le petit rayon de bandes dessinées de la librairie près de chez moi. Cela fonctionne finalement assez bien, en renforçant les contrastes entre ombre et lumière, un aspect essentiel dans ce roman.

Ce fut une bonne façon pour moi de relire ce grand classique d’un de mes auteurs préférés, et qui pourtant me semble bien plus difficile à comprendre que ses autres écrits. Je crois en avoir mieux saisi les aspects principaux et les ressorts. La bande dessinée y a aidé, mais aussi et surtout l’extrait de la préface d’Albert Camus à l’édition américaine de l’Etranger* qui est adjoint à cette bande dessinée et qui jette un éclairage intéressant sur l’œuvre.

* Cette préface date de 1955, alors que l’ouvrage a été publié en France en 1942.

98raton-liseur
jan 10, 2012, 12:42 pm

Je m’aperçois en cette fin d’année que j’ai oublié de faire la critique de ce livre lu en juin dernier pour me remettre doucement à l’espagnol. Ce n’est pas une lecture que je recommande, mais pour mémoire, je l’ajoute comme un post scriptum à ma liste de lecture de l’année.

99raton-liseur
jan 10, 2012, 12:45 pm

67. Baulito de cuentos contados por Pascuala Corona (Une brassée de contes racontés par Pascuala Corona*) - Teresa Castelló Yturbide
Ce recueil contient des contes pour enfants tels qu’ils étaient racontés il y a quelques décennies par les nourrices mexicaines. Une belle idée et un genre qui me plaît bien en général, pour lire des histoires simples tout en apprenant un peu de la culture du pays.
Pourtant j’ai été déçue ici. Les histoires m’ont parues un peu trop semblables les unes aux autres, trop convenues, et ne me semblent pas refléter la spécificité culturelle que j’en attendais. La lecture m’a vite lassée et je n’ai lu qu’une petite moitié des histoires. Une bonne idée, mais pour un résultat qui laisse sur sa faim. Tant pis…

* A ma connaissance ce livre n’a pas été traduit en français. La traduction du titre est donc ma propre invention…

100raton-liseur
jan 10, 2012, 12:57 pm

Voici donc une année de lecture qui s’achève, pour laisser place à une autre. Un assez grand nombre de livres cette année, au vu de mes habitudes de lecture personnelles. Des livres inégaux, mais beaucoup de très belles découvertes, que ce soit The City & the City de China Miéville ou, plus récemment Nous, les noyés de Carsten Jensen. Une belle découverte en littérature jeunesse, aussi, avec la série des Fairy Rebels, dont j’attends la sortie du quatrième tome au début de l’année 2012 en Angleterre.
Des valeurs sûres aussi, comme Chabouté, mais une année avec de façon générale bien peu de classiques. Cela me manque d’ailleurs et il est fort possible que mon furetage livresque me mène un peu plus vers ces étagères, au moins dans les premiers mois de 2012.

Lectures à suivre donc (ici par exemple !), et à tous, bon vagabondage livresque !

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